Souvenirs de certains utilisateurs de Twitter le jour de l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022

Illustration créée avec OpenAI par Global Voices

Il y a un an, le 24 février, la Russie envahissait l'Ukraine et a commencé à bombarder le pays. Une utilisatrice de Twitter, @KantWilde, qui se décrit comme une journaliste basée à Toronto, et travaillant actuellement pour la BBC World Service, a demandé aux internautes comment ils se souvenaient de ce jour fatidique.  Ce seul jour, elle avait déjà recueilli 173 réponses venant de personnes de divers pays et nationalités. Global Voices a traduit certains de ces tweets.

Elle-même a déclaré :

J'ai essayé de me souvenir de ce qui s'est passé le 24 février l'année dernière. En gros, tout a commencé pour moi le 23 vers 22 h, heure française, lorsque l'un des comptes OSINT a twitté qu'il y avait une activité sur les fréquences intercom des bombardiers de l'aviation russe.

— вик ты чего (@KantWilde) 21 février 2023

Voici ci-dessous quelques souvenirs du jour de l'invasion russe de l'Ukraine, le 24 février 2022.

Mon mari m'a réveillée le matin, en m'apportant une tasse de café au lit. Puis, on a discuté un peu sur quelque chose et, lorsque j'ai fini de boire mon café, il m'a dit: « la guerre a commencé !». Il m'avait donc distraite de mon téléphone pour que j'aie le temps de boire mon dernier café dans cette vie qui était terminée. C'est un homme formidable.

— городищ говорит (@gorodishch) 21 février 2023

Un autre internaute a twitté :

Je me suis réveillée, j'ai lu les informations et, en l'espace de 20 minutes, j'ai acheté trois billets pour moi, mon fils et le chien pour quitter le pays. Depuis lors, nous ne sommes pas repartis chez nous.

— небо (@Marysiajaja) 21 février, 2023

Voici ce qu'un autre utilisateur de Twitter a dit de cette journée :

Je dormais. Un ami qui vit dans un fuseau horaire de +4 heures par rapport au mien m'a envoyé un message: «Tu ferais mieux de ne pas te réveiller». En général, on ne peut pas décrire plus éloquemment les premières sensations ressenties à la lecture d'une telle nouvelle. Seulement l'envie de ne pas se réveiller. Puis, j'ai pleuré longtemps dans la salle de bains. J'ai l'impression qu'une éternité s'est écoulée.

— сэйлем сэйберхэген (@evastalking) 21 février 2023

Un sentiment d'irréalité se lit dans ce tweet :

Pour une raison quelconque, la chienne s'est levée tôt, à 6 heures. Je suis allée tranquillement me promener avec elle et, comme d'habitude, j'ai commencé à lire des informations sur mon portable… Je suis revenue en courant et j'ai réveillé mon mari en lui disant : «Nous [les Russes] sommes en train de bombarder Kiev, qu'est-ce qu'on doit faire ?»

— Shhhhh (@polly_brewer) 21 février 2023

Certains se souviennent que leur première réaction a été de protester :

C'était deux jours après que mes employés soient rentrés de leur congé maladie. Je devais aller skier le 25 pour le week-end, après 14 jours de travail. En conséquence, toute la matinée du 24, j'ai appelé ou envoyé des messages à des ami.e.s en Ukraine.  Après le travail, j'ai été horrifié d'être battu sur la place, alors que je protestais avec mes collègues.

— овен. (@ne_razbirayus) 21 février 2023

Pour d'autres, la date du 24 février rappelle la mort précoce d'amis :

Je ne me souviens pratiquement de rien. Je me suis endormie tôt, en lisant quelque chose pour le travail.  J'ai été réveillée à 7 heures du matin par le cri d'un ami qui partait au travail -Il avait demandé un congé, mais n'était allé nulle part- «Ginny, lève-toi, putain, la troisième guerre mondiale a commencé ! ». Deux semaines plus tard, nous avons appris que notre ami, un cinéaste de Kharkiv, était décédé.

— Jeanny the Abobus 🏳️‍⚧️ (@djinn__rd) 22 février 2023

Beaucoup expriment un sentiment de perte de sens de la vie :

En roulant jusqu'au travail, tout allait si bien. Le délire du grand-père débile [c'est ainsi que Poutine est appelé par les Russes qui s'opposent à sa politique] n'a pas pris le dessus depuis longtemps. Arrivé au travail, la guerre a commencé. Deux jours d'apocalypse. Depuis lors, je n'ai jamais eu l'impression de faire quelque chose d'important et de nécessaire dans ce contexte de guerre. Tout est petit et inutile.

— Шестимерный бублик (@6n_torus) 22 février 2023

Le sentiment de honte est une autre expérience courante :

Le 23 février, j'ai appelé mon père, un militaire retraité depuis 30 ans, pour le féliciter.  Il m'a répondu qu'il n'acceptait pas les félicitations et qu'il avait honte de l'armée. Avant d'aller nous coucher, nous avons essayé d'acheter des billets d'avion pour se rendre en Fédération de Russie pour les vacances de mai. Cependant, le paiement n'a pas été effectué et nous sommes allés nous coucher. Nous nous sommes réveillés à 8 heures du matin, lisant les informations tandis que notre voisin ukrainien derrière le mur pleurait bruyamment.

— 💙💛 Stop War, Stop Putin (@Molzenna) 22 février 2023

Certains, bien qu'en Russie, vivent à la frontière même de l'Ukraine et se souviennent des bombardements de ce jour :

Nous nous sommes réveillés vers 4-5 heures du matin parce que les fenêtres et la porte du balcon tremblaient. C'est  à Belgorod que nous vivions.
Nous ne savions pas très bien ce qui se passait, mais lorsque nous avons lu les commentaires sur les réseaux sociaux, tout le monde a compris.

— Оленина (@Estr1lda) 21 février 2023

La guerre a également séparé de nombreuses familles, comme le rappelle cet utilisateur de Twitter :

Guerre

À 10 h, j'ai appelé l'Ambassade de Pologne pour obtenir des documents de visa pour ma fille

Personne n'a répondu.

À 12 h, j'étais au travail

J'ai vu des cannibales dans les environs (des collègues qui soutenaient la guerre).

Nous sommes en Pologne
Ma fille en Biélorussie
Mon fils en Arménie

Il n'y a pas de retour possible

— 🇵🇱POLak❌POTencjalny🇺🇦 (@polak_pot) 22 février 2023

La guerre est aussi, pour une kyrielle, la cause de l'exil :

La jeune fille avec laquelle ils communiquaient a écrit : «Et que va-t-il nous arriver à tous maintenant ? Que faire ?» Je n'ai pas compris. En ouvrant le deuxième message,  j'ai lu ce qu'un ami a écrit : «Pendant que tu dormais, la guerre a commencé». Je n'ai pu partir après les persécutions qu'en avril et pendant tout ce temps, je n'ai pas été chez moi et, apparemment, je n'y rentrerai pas de sitôt.

— АнаКондуш (@AnaKondush) 22 février 2023

Pour plusieurs, les pays voisins sont devenus les refuges les plus accessibles :

La veille, mon mari et moi avons discuté, juste avant d'aller nous coucher, du fait qu'il n'y aurait finalement pas de guerre. Ce n'est pas possible. Le matin du 24 février, je me suis réveillée plus tard que mon mari et la première chose qu'il m'a dite, c'est que la guerre avait commencé. J'ai pleuré tous les jours pendant deux semaines consécutives, jusqu'à ce que nous nous envolions pour le Kazakhstan, chez ma mère.

— Aliya Gagarina (@Karelianwife) 22 février 2023

L'impuissance, accompagnée d'un sentiment de prémonition, est une expérience communément partagée :

Je ne me souviens pas comment je me suis réveillée, mais je me souviens très bien que je n'ai pu m'endormir qu'à partir du troisième jour. Je ne pouvais pas manger, penser à quoi que ce soit, exister. Je ne lâchais pas le téléphone, je pleurais et je n'arrivais pas à y croire. Bien que j'attende cette guerre depuis la fin de l'année 2020, un trou noir s'est ouvert en moi.

— Irina Parfenova (@i_parfenova) 22 février 2023

Nombreux se demandent comment poursuivre leur vie quotidienne dans un tel contexte:

J'ai écouté les informations en permanence ces derniers temps. Je faisais mes courses quand j'ai appris qu'il avait attaqué Kiev. J'ai pleuré sur le parking pendant deux heures. Puis je suis rentrée chez moi et je me suis sentie folle de voir que la vie continue ici, que les enfants vont à l'école, que le printemps commence. Mais, quelque part, ma patrie tue des gens.

— #никтонечитает (@KolodkoAlesia) 22 février 2023

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