Les différentes versions de la langue française qui se parlent aux quatre coins du monde ne se ressemblent pas toujours. Dans notre rubrique “Les mots ont la parole”, nous mettons à l’honneur les mots ou expressions qui sont spécifiques à une région, un pays, une communauté, mais aussi les intraduisibles qu’on garde en français tels quels, ou qu’on traduit à moitié, et enfin les mots français qui passent dans d’autres langues et ne se traduisent pas, mais prennent parfois un nouveau sens.
Tous nos épisodes précédents sont à retrouver ici: Les mots ont la parole.
Aujourd’hui, nous avons choisi ces trois termes et expressions:
Mandarin Ce terme est dérivé du mot portugais “mandarim“, qui vient du verbe portugais “mandar” qui signifie commander, ordonner; mais qui est aussi influencé par le mot malais “menteri” en référence au titre de conseiller du roi, ou au ministre. Au départ le terme de mandarin est employé par les Portugais pour désigner un haut fonctionnaire, ou quelqu'un d'influent, en Chine (官僚) et en Malaisie, à partir du 16eme siècle.
Aujourd'hui, le terme fait référence d’une part à un savant accompli, et d’autre part à une des langues chinoises qui a un statut officiel en Chine et à Taïwan.
Lire: Quelles sont les appellations utilisées par les locuteurs de chinois mandarin pour décrire leur propre langue?
Ce terme apparaît aussi en littérature, comme dans le titre du roman culte “Les Mandarins” (1954) écrit par Simone de Beauvoir, ou dans celui de “le Mandarin” (1880) de l'écrivain portugais Eça de Queirós.
Angažmá En tchèque, ce mot signifie contrat d’artiste, mais son origine est le mot français engagement. Ce gallicisme vient de l’expression “engager un artiste”, ce qui explique son sens en tchèque moderne de contrat détaillant les conditions d’un recrutement par une institution culturelle, ou sportive.
Cette archive montre un extrait d’une émission datant de 1972 de la télévision tchécoslovaque avec l’actrice culte Jiřina Bohdalová qui passe un test pour se faire engager, d'où le titre de “Haló, tady Jiřina: Zkouška na angažmá.”, soit “Bonjour, ici Jiřina. Séance de casting.
Au fil du temps, ce terme a aussi pris un nouveau sens plus général de participation à un projet.
Selon Wiktionary, le tchèque comporte aujourd’hui plus de 3 500 gallicismes.
Brouteur Ce mot nouchi utilisé en Côte d'Ivoire fait référence aux arnaqueurs. Le nouchi est une langue créée sur la base du français et de plusieurs langues africaines.
Le terme de brouteur apparaît au début des années 2000 quand certains jeunes Ivoiriens voient dans l’internet un moyen pour escroquer les personnes fortunées. A l’image des moutons qui broutent de l’herbe sans faire trop d’effort, le terme s’applique à ces jeunes qui s'enrichissent facilement en utilisant les réseaux sociaux comme moyen de discussion pour se rapprocher de certaines personnes, les fidéliser et exploiter leur crédulité. Plusieurs techniques sont utilisées: création de faux comptes avec des photos de stars et personnalités sur le profil pour discuter avec les victimes ; chantage sexuel; escroquerie sentimentale; et même envoûtement.
Cette pratique est reprise par des jeunes d’autres pays du continent comme le Ghana, le Bénin, le Cameroun, le Nigeria. Au Burundi et au Cameroun, les brouteurs sont aussi appelés gratteurs. Cette vidéo propose une enquête sur ce phénomène en Côte d’Ivoire.
Si vous avez des mots ou expressions à partager pour les faire figurer dans notre rubrique “Les mots ont la parole” contactez-nous: filip.noubel@globalvoices.org