Union des Comores: vers une crise post-électorale après la réélection du président sortant ?

Azali Assoumani, président réélu aux Iles Comores; Capture d'écran de la chaîne YouTube de Tv5monde

Azali Assoumani rempile pour un nouveau mandat à la tête de l'Union des Comores, conformément aux résultats provisoires des élections du 14 janvier 2024. L'opposition crie au scandale, entraînant les jeunes dans des manifestations.

Le 14 janvier 2024, les Comoriens se rendent aux urnes pour élire un nouveau dirigeant à la tête du pays pour les cinq années à venir. Azali Assoumani, président sortant et candidat à sa propre succession, fait face à cinq candidats de l'opposition: Salim Issa Abdillah du parti Juwa; Bourhane Hamidou du Mouvement pour les Comores de demain; Aboudou Soefo, ancien ministre des Affaires étrangères; Mouigni Baraka Saïd Soilihi, ex-gouverneur de la Grande Comore; et Abdallah Mohamed Daoudou, ancien ministre de l’Intérieur et ancien maire de Moroni, capitale du pays.

Le 16 janvier 2024, Azali Assoumani est déclaré vainqueur par la Commission électorale nationale indépendante (CENI) avec 62,97% des votes. Il brigue ainsi un quatrième mandat (2002, 2016, 2019 et 2024), et de plus, un troisième consécutif au poste de président de l’Union des Comores. Salim Issa Abdillah, candidat indépendant vient en deuxième position avec 20,6% des voix, tandis que Abdallah Mohamed Daoudou se contente de 5,88%.

Cette vidéo de Tv5monde illustre la proclamation de la CENI:

La population de l'Union des Comores est estimée à 860 550 habitants dont près de 338 000 électeurs sont appelés aux urnes. La diaspora comorienne, estimé à 600 000 personnes vivant principalement en France est exclue du processus électoral.

Dans un article de Radio France Internationale (Rfi), Said Larifou, avocat et ancien candidat à la présidentielle exilé en France depuis 2019, estime que la mise à l'écart de la diaspora remet en cause le caractère démocratique de l'élection:

Si une portion importante de la population est exclue de ce processus, donc il n'est pas démocratique. C'est un déni de démocratie. C'est un premier point. Deuxième point, ce processus n'est pas du tout démocratique même pour ceux qui sont sur place aux Comores dans la mesure où Azali a entre ses mains tous les leviers du pouvoir, et le processus est sous le contrôle exclusif d'Azali. Il n'y aura pas de changement aux Comores tant qu'Azali sera aux commandes.

Le jour des élections, des irrégularités sont constatées dans certains bureaux de vote. Cette vidéo publiée sur le compte X (ex-Twitter) de Tv5monde dédiée aux actualités africaines montre des échauffourées entre forces de l'ordre et citoyens :

Mécontents des résultats provisoires annoncés par la CENI, les jeunes descendent dans la rue et manifestent leurs indignations et frustrations dès le 17 janvier.

Début d'une crise post-électorale?

Ce jour-là, au lendemain de la proclamation des résultats provisoires, les jeunes Comoriens prennent d'assaut les rues de la capitale. Très tôt dans la matinée, le bâtiment du ministère de l’aménagement du territoire est ainsi incendié. Une vidéo publiée par Abdou Moustoifa, journaliste et correspondant de Reuters, sur son compte X (ex-Twitter) montre les dégâts causés:

Les heurts entre les jeunes et les forces de l'ordre dans la journée du 17 janvier font un mort et cinq blessés.

Du côté de l'opposition, un appel à manifestation est lancé pour le vendredi 19 janvier, comme l'indique Tv5monde dans cette publication sur son compte X:

Internet coupé

Durant cette journée du 17 janvier, une large perturbation de l'internet est constatée. La connexion internet est restreinte et parfois interrompue. Les Comoriens sont coupés du reste du monde et les réseaux sociaux sont inaccessibles. En témoigne cette publication d'un compte dénommé Comorien ancien sur le réseau X :

Le même constat est fait par Laklass un autre citoyen de l'Union des Comores sur son compte X . Il écrit:

Inquiétude au niveau international

Inquiètes de l'évolution de la situation, les institutions internationales appellent le peuple comorien au calme et à la retenue. C'est le cas de l'Organisation des Nations Unies (ONU) très préoccupée par l'allure de la crise. A travers un communiqué publié sur le site du Haut commissariat des Nations-Unies pour les Droits de l'Homme ( OHCHR), Volker Turk, le haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme appelle les autorités comoriennes à garantir la liberté d'expression et le droit de manifester pacifiquement. Sur le compte X des Nations Unies, il est écrit:

#Comoros : Suite aux manifestations qui ont suivi l'élection présidentielle, @volker_turk appelle tous à faire preuve de retenue et exhorte le gouvernement. pour garantir le droit à la liberté d’expression. « Il est primordial d'assurer un environnement sûr, où tous les Comoriens peuvent exprimer librement leurs opinions »

— Nations-Unies pour les Droits de l'Homme 17 janvier 2024

Nouveaux défis

Aux défis majeurs que sont la migration massive, le chômage, la pauvreté, la corruption, cette crise post-électorale pose un nouveau défi à Azali Assoumani, qui est également président en exercice de l'Union Africaine (UA). En effet, selon l'ONG Transparency International en 2022, l'Union des Comores est classée 167ème sur 180 pays pour son niveau de corruption. Le revenu moyen mensuel par habitant est de 138 dollars américains, ce qui en fait un des pays les plus pauvres au monde.

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