
Photo de Kathrine Heigan sur Unsplash
Cet article a été initialement publié en russe le 17 avril 2025 sur Novaya Vkladka, un partenaire de Global Voices, puis traduit et édité pour plus de clarté et republié avec la permission de Novaya Vkladka.
Début avril, un passager inhabituel a voyagé en bus de Volgograd jusqu'à Moscou : une chauve-souris. Elle a été transportée au zoo de Moscou pour y recevoir des soins. En Russie, des dizaines de bénévoles passionnés des animaux se mobilisent pour venir en aide aux chauves-souris, des animaux souvent incompris, mais essentiels au bon équilibre des écosystèmes. Novaya Vkladka a enquêté sur la façon dont ces bénévoles assurent une hibernation sécurisée aux chauves-souris et les soignent jusqu'à leur rétablissement au printemps.
Au début du mois d'avril, Pavel, un mécanicien automobile à Volgograd, a entendu un couinement en arrivant au travail. En suivant le bruit, il a découvert une toute petite chauve-souris sous une clôture, l'aile abîmée. Pavel s'est rendu chez plusieurs cliniques vétérinaires à Volgograd, mais aucune ne savait comment s'y prendre pour soigner un tel animal. Il a finalement reçu l'aide des bénévoles du centre de réhabilitation de la faune sauvage Bird Island. La directrice, Arina Yerina, a contacté le zoo de Moscou, où des spécialistes de la réhabilitation des chauves-souris ont accepté de prendre l'animal en charge.
Pavel a financé le transport de la chauve-souris jusqu'à Moscou, un chauffeur de bus ayant accepté d'emmener ce passager hors du commun. Au zoo de Moscou, l'animal a été diagnostiqué avec une fracture à la patte avant droite. Elle suit désormais une rééducation, et son sauveteur, Pavel, a décidé de devenir bénévole au centre Bird Island de Volgograd.
Ce n'est là qu'une histoire parmi tant d'autres en Russie. Chaque année, vers le mois d'octobre, les chauves-souris de la région se préparent à hiberner pendant l'hiver, en choisissant un abri où elles passeront environ six mois. Il arrive toutefois qu'elles s'installent dans des lieux inadaptés et se blessent à leur réveil en avril ou en mai, ce qui rend leur sauvetage nécessaire.
D'autres problèmes surviennent au début de l'hiver, lorsque les chauves-souris tentent d'hiberner dans des endroits trop exposés, comme des halls, des façades d'immeubles, des balcons ou des rebords de fenêtres. Dans ces cas-là, elles doivent être secourues, car elles risquent de mourir de froid si elles ne sont déplacées vers un abri plus sûr.
Les consignes des bénévoles destinées aux personnes qui trouvent une chauve-souris rappellent que ces animaux ne sont généralement pas dangereux, même s'ils peuvent siffler ou agiter leurs ailes par peur.
A Moscou, le centre de sauvetage des chauves-souris Batspas existe depuis 2020. Sa chaîne Telegram compte près de 3 000 membres, en comptant les Moscovites et les habitants d'autres régions à la recherche de conseils.
L'aide apportée aux chauves-souris ne se limite pas à Moscou : des communautés similaires existent à Volgograd, Samara, Voronej, Rostov-sur-le-Don, Oufa, Krasnodar et Penza.
Ces groupes sont généralement créés par des citoyens engagés, à quelques exceptions près. À Rostov-sur-le-Don, par exemple, un centre de réhabilitation pour chauve-souris à ouvert ses portes à l'université d'État du Don, encadré par des zoologues et des vétérinaires. Ce centre, comme d'autres communautés similaires, conseille sur la prise en charge des chauves-souris et accueille celles qui sont blessées. Au printemps 2024, le centre a organisé sa première cérémonie de « récompenses » : les chauves-souris réhabilitées ont été relâchées dans la nature et une formation de sensibilisation sur leur alimentation et leurs soins a été organisée.
Certaines communautés viennent en aide à plusieurs animaux. À Oufa, par exemple, les bénévoles secourent non seulement les chauves-souris mais aussi les oiseaux, les écureuils et les hérissons. Le centre de réhabilitation pour animaux sauvages de Volgograd s'occupait principalement des oiseaux, mais depuis cinq ans, il aide aussi les chauves-souris. En décembre 2024, les bénévoles ont aidé sept chauves-souris à entrer en hibernation.
À Novosibirsk, les spécialistes d'organisations environnementales ne se contentent pas de réhabiliter les chauves-souris mais informent aussi les habitants sur la manière de les nourrir et sur leur hibernation avant leur remise en liberté. Il s'avère qu'après leur réhabilitation, les chauves-souris attendent le printemps dans des réfrigérateurs maintenus à une température de 3 à 5 °C.
Certains bénévoles aménagent chez eux des refuges temporaires pour les chauves-souris. Olga Tarasova, bénévole au centre de réhabilitation pour chauve-souris du zoo de Moscou et habitante de Chakhty, dans la région de Rostov, leur a dédié une pièce de sa maison : un parc équipé de hamacs, de cabanes miniatures et d'un réfrigérateur destiné à l'hibernation. La plupart des chauves-souris sont relâchées dans la nature après leur réveil, mais certaines, trop blessées, ne pourraient survivre en liberté. Olga les appelle par leurs noms, et elles réagissent même au son de sa voix. Elle a aussi remarqué que chacune avait sa propre personnalité : certaines sont affectueuses et calmes, d'autres jalouses et fougueuses. Il y en a même qui aiment la musique : d'après Olga, la musique classique a un effet apaisant sur certaines chauves-souris.
Selon le site Internet du parc national du Caucase, la Russie abrite environ 50 espèces de chauves-souris, qui figurent toutes dans le livre rouge des espèces menacées. Les interventions humaines sont de plus en plus nécessaires pour protéger ces animaux, car leurs habitats naturels, les forêts anciennes et les grottes, sont perturbés et grignotés par l'urbanisation. Les chauves-souris ont également un faible taux de reproduction et une femelle ne donne généralement naissance qu'à un seul petit.
Elles s'installent dans des cavités d'arbres, parfois dans des structures construites par l'humain, et certaines espèces vivent en vastes colonies dans des grottes. En hiver, en raison du manque d'insectes, elles entrent en hibernation. Pour ce faire, elles recherchent des abris sûrs, principalement des grottes, où leur température corporelle chute jusqu'à s'aligner sur celle de l'air ambiant. Elles peuvent dormir pendant cinq à six mois. Malgré leur petite taille, les chauves-souris vivent en moyenne dix à douze ans, mais certaines atteignent quarante ans. Le parc national du Caucase rappelle cependant que les chauves-souris peuvent être porteuses de la rage, et qu'il convient donc de rester prudent à leur contact.