L'entrepreneur togolais et panafricain Gervais Koffi Djondo: un modèle pour l'intégration économique en Afrique

Gervais Koffi Djondo, capture d'écran de la chaîne YouTube au nom de Gervais Koffi Djondo

L'intégration économique en Afrique est un sujet courant au programme de conférences et ateliers, mais il existe un gouffre entres ces discussions et la pratique. Pourtant, certains entrepreneurs démontrent que cela est possible et profitable. C'est le cas du Togolais Gervais Koffi Djondo qui a fait de l'intégration africaine sa mission.

Cette thématique est aussi l'un des principaux objectifs de l'Union Africaine (UA), annoncé dès sa création le 9 juillet 2002 et ainsi défini:

…accélérer l’intégration politique et socio-économique du continent ;

…promouvoir le développement durable aux plans économique, social et culturel, ainsi que l’intégration des économies africaines ;

Mais cette intégration africaine reste, en 2025, plus un mythe qu'une réalité. En dépit de nombreuses politiques d'intégration, les Africains vivent rarement dans le cadre d'une intégration régionale. Pourtant, des exceptions viennent contredire ce constat. C'est le cas du Togolais Gervais Koffi Djondo, qui à travers son audace a offert au continent africain deux institutions panafricaines durables.

Une vision panafricaine de l‘entrepreneuriat

En Afrique, le système bancaire est gouverné par des institutions financières détenues ou dirigées par des occidentaux, des années 60 au milieu des années 80. Mais en 1985, la donne change quand Gervais Koffi Djondo, entrepreneur togolais à la pensée panafricaine co-fonde avec Adeyemi Lawson, à cette époque, homme d'affaire et président de la Chambre de commerce et d’industrie du Nigeria, Ecobank, une institution financière présente aujourd'hui dans plus de 30 pays sur le continent.

Loin de satisfaire des besoins financiers propre aux Togolais, l'entrepreneur pense large, et à l'avenir de tout un continent en terme de couverture financière. Djondo se souvient de ses débuts difficiles :

« Toutes ont décliné notre offre. Nous nous sommes alors tournés vers Citibank, qui nous a proposé une équipe, et en moins d’un an, en 1985, nous avons monté la banque. Nous avons installé le siège à Lomé, non pas parce que je suis Togolais, mais parce que le Togo est le seul pays qui ait accepté de nous accorder un statut fiscal de société offshore. »

Cette prouesse continentale donne des ailes à Gervais Koffi Djondo: après Ecobank, il se lance dans la mise en place d'une compagnie aérienne, après la faillite en août 2001 d’Air Afrique. Cette ancienne compagnie aérienne ne fonctionnait que dans l'espace africain francophone, et était largement contrôlée par la France.

Sur sollicitation de présidents africains, d'hommes politiques et diverses personnalités influentes du continent, Djondo entame alors un projet qui finit par voir le jour le 15 janvier 2010, date de lancement de la compagnie Asky Airlines.

Interviewé par le média Agence Ecofin en juillet 2019 après la sortie de son livre « L’Afrique d’abord », Djondo déclare :

Il nous appartient de faire avancer les choses. Je pense en premier lieu à l'intégration africaine. C'est pour cela qu'Ecobank est une banque panafricaine et qu'Asky est une compagnie aérienne panafricaine. Tant que l'Afrique ne comprendra pas l'importance de son union, elle ne fera que reproduire le schéma colonial des États dont les économies sont peu développées et qui se contentent de faibles échanges commerciaux entre eux.

Djondo se rappelle des moments cruciaux de la mise en place de ses deux joyaux. Au média Agence Ecofin, il indique :

C’était après la rencontre des présidents Laurent Gbagbo et Abdoulaye Wade avec le PDG d’Air France au siège de la compagnie. Charles Konan Banny avait été chargé de suivre le dossier de la compagnie par les deux présidents. (…) Je me suis plongé dans les détails et j’ai vu qu’ils voulaient refaire Air Afrique, c’est-à-dire une compagnie francophone. J’ai décidé de tout revoir et d’élargir le projet aux anglophones », explique le fondateur d’Ecobank.

Un modèle pour la jeunesse

De jeunes entrepreneurs trouvent aujourd'hui en la personne de Gervais Koffi Djondo, une boussole entrepreneuriale. Sa volonté de contribuer au développement économique du continent et sa vision d'une Afrique intégrée font de lui un modèle hors norme pour toute une génération, comme l'explique cette vidéo de Afrik'Expert lors de la présentation de son livre:

Adamas Koudou, jeune entrepreneur togolais et co-fondateur de la marque Natuthé Kinkéliba partage avec Global Voices son admiration pour Djondo :

Gervais Koffi Djondo est une figure emblématique dont l'impact sur le monde entrepreneurial africain et l'intégration du continent est indéniable.

Cofondateur d'Ecobank et d'Asky Airlines, il a démontré une vision audacieuse en créant des institutions panafricaines majeures qui ont, non seulement stimulé le commerce et l'investissement à travers l'Afrique, mais ont aussi concrètement fait progresser l'intégration régionale.

Son œuvre témoigne d'un engagement profond envers le développement économique endogène et l'unité africaine.

Sur X, Mustapha Njie – TAF, entrepreneur et philanthrope gambien témoigne de la vision de Djondo pour l'Afrique:

(…)Grâce à la vision et au travail acharné de M. Djondo, Ecobank est devenue l'une des plus grandes banques d'Afrique, avec une présence panafricaine. Cela a également permis à #Ecobank et à Asky d'établir leurs sièges sociaux à Lomé, apportant d'énormes avantages socio-économiques au Togo. Cela témoigne de l'importance du soutien aux entrepreneurs locaux en Afrique.

M. Djondo aura 90 ans l’année prochaine et ses contributions au paysage commercial africain doivent être célébrées au plus haut niveau.

En tant que jeunes #African #entrepreneurs et leaders, imitons le leadership et aspirons à l'excellence, comme M. Djondo. Son histoire de réussite est une source d'inspiration pour nous tous, en Afrique de l'Ouest et au-delà.

pic.twitter.com/FTJ2JV65ts

— Mustapha Njie – TAF (@TafNjie) August 10, 2023

Intégration continentale, otage de la souveraineté nationale

La principale entrave à l’intégration économique de l'Afrique est l'argument de la souveraineté nationale. Au nom d'une politique protectionniste de l'économie nationale, chaque pays établit des règles qui ne favorisent pas la libre circulation des personnes, des biens et des services, mais au contraire, encouragent l'installation de barrières douanières. Cet état de fait est également un blocage qui limite la mise en place et l'application d'une autorité régionale et continentale nécessaire à l'intégration, contraignant ainsi les populations des autres pays à payer de lourd tribu avant  d'accéder à leur territoire.

Il existe tout de même des organisations régionales comme la Communauté de développement de l'Afrique australe (SADC), la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO), la Communauté économique des États de l'Afrique centrale (CEEAC), et le Marché commun de l'Afrique orientale et australe (COMESA). Toutefois des différends frontaliers et des tensions politiques divisent certains pays et freiner toute velléité d’intégration du marché. Alors que les projections économiques sur le développement de l'Afrique indiquent un fort potentiel de croissance. 

Lire notre cahier spécial : 

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