Vendredi matin tôt, une météorite s'est désintégrée dans le ciel au-dessus de la ville de Tcheliabinsk, dans l'Oural, avant de peut-être s'écraser au sol. Si les autorités russes recherchent [en russe] où les débris ont pu atterrir, le fait est que sa chute a causé plusieurs ondes de choc, qui ont brisé les vitres et fait chuter divers objets. Dans la soirée, les responsables de l'Oblast (région) de Tcheliabinsk annonçaient [en russe] près d'un millier de blessés, dont 204 enfants, la plupart par des éclats de verre.
Une pléthore de vidéos d'amateurs a envahi YouTube. Beaucoup de clips montrent la suite immédiate de la désintégration, c'est-à-dire l'épaisse traînée de fumée flottant dans le ciel. Les Russes étant nombreux à faire fonctionner dans leurs voitures des caméras de bord (surtout pour des motifs d'assurance), les images de la chute de la météorite abondent également. Le populaire photo-blogueur Ilya Varlamov a publié [en russse] dans la journée une large collection de telles vidéos sur son blog de LiveJournal.
Les dégâts et blessures provoqués hier par cette catastrophe n'ont pas empêché, bien au contraire, les internautes russes de faire de l'esprit et de propager des mèmes. Si plaisanter est un remède naturel aux drames, le fait que la météorite ait atterri précisément à Tcheliabinsk porte en soi un comique sur mesure pour les Russes, car la ville est réputée, célébrée et brocardée pour être un coin particulièrement rude et pauvre du pays. Les blagues sur Tcheliabinsk [en russe] ont une place à part dans l'univers de l'humour russe, précieusement préservée dans le segment Ivan Douline du show télévisé Nacha Russia [‘Notre Russie’, en russe]. Un exemple : “le métro de Tcheliabinsk est si costaud qu'il se déplace sous terre sans tunnels.”
Si ce thème de blague n'a rien de neuf, les utilisateurs de RuNet ont réussi à se faire rire avec un étonnant succès [en russe]. Un faux compte du Ministère des Affaires étrangères a ainsi twitté [en russe] :
Челябинский цинковый завод настолько суров, что берёт руду прямо из космоса
L'usine de zinc de Tcheliabinsk est tellement rude qu'elle va chercher le minerai directement dans l'espace
Thème et chute de l'anecdote sous-entendus, d'autres utilisateurs de Twitter ont diffusé cette version abrégée :
Челябинский дождь настолько суров… #метеорит
La pluie à Tcheliabinsk est tellement rude que… #meteorite
Des personnalités publiques se sont aussi hasardées hors de leur sérieux habituel. Anna Vedouta, la secrétaire de presse du blogueur anti-corruption Alexeï Navalny, a re-poblié une carte postale électronique de ce dernier, avec ces mots [en russe] :
Жители метеорита с ужасом наблюдали приближение Челябинска.
Les habitants de la météorite ont regardé avec épouvante s'approcher Tcheliabinsk.
Parodiant le projet de loi actuel d'interdiction de la “propagande homosexuelle,” des utilisateurs de Twitter ont propagé [en russe] la fausse information que la Douma s'apprêtait à adopter une “interdiction des météorites,” façon de dire que la campagne du gouvernement contre les gays est aussi irrationnelle que la mise hors la loi des catastrophes naturelles.
Le journaliste Dmitri Olchanski a déploré l'état du pays, écrivant [en russe] sur Facebook, “pauvre, pauvre Russie, c'est toujours pareil,” en rapport avec un article [en russe] de Lenta.ru selon lequel des habitants de Tcheliabinsk brisent leurs fenêtres pour obtenir les indemnisations publiques qui attendent les victimes de la météorite.
Sans oublier que les internautes russes ont fait chauffer leurs versions (probablement piratées) d'Adobe Photoshop pour composer une volée de parodies, ou “fotozhaba” (littéralement “photo-crapaud”) des images de la météorite croisant dans le ciel de Tcheliabinsk. Les unes sont tout à fait apolitiques (comme un rapprochement avec une attaque d'Angry Birds ou le scénario du film Armageddon de 1998), d'autres se moquent de Vladimir Poutine (et de sa culture du machisme) ou même de la membre des Pussy Riot Nadejda Tolokonnikova.
Ci-après, voici quelques amusants exemples tous anonymes, parmi les plus diffusés, de la réaction “fotozhaba” à la météorite de Tcheliabinsk.
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