Chili : Non à la centrale hydroélectrique Hidroaysen

A la confluence des fleuves Baker et Nef. Photo sur Flickr de jpgarnham (CC BY-NC-ND 2.0)

Lundi 9 mai a eu lieu la réunion de la Commission d'évaluation environnementale, réunie à Coyhaique, une ville de la Patagonie chilienne. La Commission composée de 12 politiques a voté pour l'approbation du projet de construction de la centrale hydroélectrique Hydroaysen , propriété des entreprises d'électricité espagnole et italienne Endesa et chilienne Colbún. Le projet envisage la construction et la mise en service de cinq centrales hydroélectriques, lesquelles se situeront dans la région de Aysén , dans le sud du Chili: deux sur le fleuve Baker et trois sur le fleuve Pascua pour un investissement d'environ 3200 millions de dollars.
Dans cette vidéo, il est brièvement expliqué en quoi consiste ce projet.

Le projet a été approuvé par 11 voix pour et une abstention dans une ambiance tendue, marquée par la présence de près de 1000 manifestants à l'extérieur de la Mairie de Coyhaique, où s'est déroulé le vote.

En dépit des 11 000 remarques déposées par les citoyens, des plaintes relatives au fait que les  rapports des organismes techniques qui ont examiné le projet ont été réécrits, de l'incompétence de  quatre ministères, de l'appui explicite du gouvernement de Sebastián Piñera et des grands médias, le  projet de Hidroaysén a été approuvé au milieu d'un important contingent de policiers. […]

(D'après le quotidien en ligne chilien El Ciudadano)

Observations auxquelles le site radio.uchile.cl a ajouté:

«L'initiative énergétique a été hautement remise en question par une série d'irrégularités qui se sont manifestées lors de la procédure comme des changements surprises et sans fondement des services   techniques. Ses détracteurs ont, de plus, dénoncé un lobby systématique des entreprises Endesa et Colbún, lobby soutenu par le gouvernement pour pousser à l'approbation de ce projet.»

Les positions varient entre les pour et les contre.

Cependant, la majorité des gens est, dans tout le pays, contre la construction comme l'a commenté sur Twitter le cabinet conseil en empreinte carbone @carboambiente :,

Les enquêtes en ligne indiquent que #NoaHidroaysen le NON au projet Hidroaysen a réuni :@Emol 53%;@laterceracom 66%;@nacioncl 79%; @PublimetroChile 81% Que veulent-ils de plus?!!!

Tomás Mosciatti, journaliste de Radio Bio-Bio, a expliqué à CNN quelles étaient les raisons de rejeter le projet Hidroaysén.

Cavalcade du mouvement Patagonie sans barrages. Photo sur Flickr de International Rivers (CC BY-NC-SA 2.0)

Plusieurs publications ont soutenu le refus du projet. Parmi elles,  celle du groupe écologiste VerDeseo qui a publié “7 arguments pour une Patagonie sans barrages“. Pablo Astudillo de El Quinto Poder (une communauté en ligne ) a aussi écrit : “Sept réflexions avant les éventuels approbation ou refus du projet Hidroaysén” qui se résument à ceci:

1. L'hydroélectricité n'est pas une énergie propre

2. Doubler la production d'électricité ne contribue pas à résoudre la pauvreté

3. Doubler la production d'électricité n'assure pas non plus le bien-être économique

4. Les énergies renouvelables non conventionnelles (ERNC) sont, elles, une option

5. Les barrages ne garantissent pas une énergie meilleur marché

6. La législation environnementale est insuffisante

7. Les citoyens ne reçoivent pas une suffisante information sur les effets négatifs des projets relatifs à l'électricité

Du côté des positions favorables, la même entreprise mentionne sur son site internet que:

1. L’ énergie du projet Hidroaysén est propre et renouvelable

2. Elle évite la construction de centrales thermoélectriques

3. Elle n'impacte pas le tourisme

4. Elle génèrera de l'emploi et des actions de responsabilité sociale positives dans la collectivité

D'un autre côté, Sebastián Jordana de Plataforma Urbana, indique dans son analyse des pour et des contre qu'il a menée dans le post intitulé Hidroaysén, ¿un mal necesario?(Hidroaysén, un mal nécessaire ?) :

“[…] Tout le monde sait que les dégâts sont à venir, alors, pourquoi construire un tel projet? La demande énergétique augmente tous les ans et par conséquent, l'offre doit augmenter aussi. On estime que d'ici à 10 ans tout au plus, le Chili ne pourra pas répondre à cette demande, c'est la raison pour laquelle de nouvelles formes de production d'énergie sont nécessaires. Les détracteurs du projet Hidroaysén parlent d'autres formes de production d'énergie : ce qui est certain, c'est que l'énergie hydraulique est propre et rentable. Par exemple, pour produire 360 MW d'énergie, il est besoin d'approximativement 25 000 hectares pour l'énergie solaire, 15 000 pour l'énergie éolienne et seulement 3600 pour l'énergie hydraulique. […]”

Felipe Cordero (@felipe_cordero), militant, blogueur et auteur d'articles pour Global Voices résume la position des détracteurs dans un tweet:

Personne ne dit que #hidroaysen n'utilise pas l'énergie renouvelable. Ce qui est renouvelable ici c'est l'eau, mais le problème, en fait, ce sont les inondations et les installations électriques.

Avant le vote, les réactions dans les médias sociaux ne se sont pas faites attendre. Des tweets contre le gouvernement et le projet ont rapidement suivi, transformant l'intitulé #noahidroaysen en un sujet tendance durant toute la journée du 9 mai. Un appel à manifester dans les rues de tout le pays a aussi été lancé. On estime que quelques 10 000 personnes ont répondu à cet appel, selon les informations du quotidien en ligne El Dinamo.

Carolina Santander (@carolinasantan) s'est plainte :

Je le dis avec beaucoup de colère, de peine et de honte, ces politiques sont (tous) des vendus, sans scrupule. #NOAHIDROAYSEN

Travesia La Bermudez (@Kaxorras_Mal) a fait remarquer :

Car nous les Chiliens, dans notre grande majorité, nous voulons une #PATAGONIASINREPRESAS! PATAGONIE SANS BARRAGE! #NOAHIDROAYSEN //RT!

L'actrice connue, Leonor Varela (@leonorvarela) s'est aussi prononcée :

J'en ai mal à l'estomac d'être si loin. Je préfèrerais être là avec vous comme la dernière fois. A ceux qui sont descendus dans les rues, tenez bon! #noahydroaysen

Cependant, ces manifestations ont été réprimées par la police chilienne, avec gaz lacrymogènes et canons. Elle a arrêté 63 personnes rien qu'à Santiago, d'après les informations du quotidien El Mercurios dans sa version en ligne. D'après la radio Cooperativa “la manifestation a réussi à rassembler quelques 7 000 personnes sur la Place d'Italie, mais les carabiniers ont dissout la manifestation avec trois canons à eau et deux lances à gaz lacrymogène […] Les manifestations se sont répétées dans d'autres villes comme à Coyhaique -face au Service d'évaluation environnementale -, à Concepción, à Temuco, à Valparaíso et à Valdivia, où la police a dissout une manifestation de près de 500 personnes avec des gaz lacrymogènes.” La page Facebook de El Quinto Poder a rassemblé des photos et des témoignages des manifestants à travers tout le Chili.

Marche contre le projet Hidroaysén à Santiago, Chili, le 9 mai 2011. Photo sur Flickr de jorgeparedes (CC BY-NC 2.0)

Andres Araos (@andresaraos) a fait ce commentaire :

19:00 la manifestation commence Place d'Italie; 19:05 les bombes lacrymogènes commencent à pleuvoir… de la répression pure contre la libre expression

La journaliste Ivonne Cubillos (@ivocubillos) fait observer :

La marche Place d'Italie n'a pu être une marche, elle a été arrêtée par les bombes lacrymogènes et les canons à eau, quelle belle démocratie!!!

La violence avec laquelle la police a fait face aux manifestants dans le pays a été dénoncée tant par les politiques que par les principaux médias, et même le Genéral des Carabiniers (la police) a été appelé à comparaître pour “abus” (information rapportée par le journal El Mercurio dans son édition en ligne)

D'un autre côté, le blogueur Tomás Bradanovic a publié contre les manifestations sous le titre “Patagonia con Represas” «La Patagonie avec des barrages», le commentaire suivant:

Nous les êtres humains avons une tendance irrésistible à suivre les modes et maintenant qu'il y a plus de communication, il est facile de les uniformiser. Aujourd'hui, c'est à la mode d'être «écologiste», ce qui est catastrophique pour l'environnement car ce dont il a le moins besoin, c'est de militants idiots et manipulables […]

Daniel Fernández, vice-Président exécutif du projet Hidroaysén, s'est aussi exprimé contre les manifestations dans une entrevue au quotidien en ligne El Dinamo, écartant l'hypothèse que la pression citoyenne puisse être un obstacle pour le projet, comme ce fut le cas pour celui de Barrancones, et déclarant : “Cent twitteurs ne constituent pas un peuple”.

Si l'on s'en réfère aux voix dissidentes, les manifestations ne font que commencer. Ils existent déjà plusieurs appels pour investir les rues les 13 et 21 mai. Le leader principal des opposants, Patagonia Sin Represas «Patagonie Sans Barrage» a commencé à diffuser une pétition en ligne, en plus d'annoncer qu'il porterait la lutte au tribunal. Dans une interview à la radio Bio-Bio l'avocat Marcelo Castillo de Patagonie Sans Barrage, a indiqué bien attristé que la lutte venait juste de commencer […] qu'il y avait près de 20 recours tant judiciaires et administratifs qui venaient s'ajouter à cette opposition au projet HidroAysén. Le directeur de Greenpeace au Chili, Matías Asún, a, de plus, critiqué dans ce même média la responsabilité historique des représentants politiques du pays ces derniers temps, soulignant qu'ils n'avaient pas pris au sérieux le sujet environnemental.

A la différence des années 90, les réseaux sociaux et les médias en ligne contribuent à présent au fait que les gens connaissent les implications des projets énergétiques, comme cela a été le cas pour le projet de centrale de Barrancones à Punta de Choros, annulé grâce aux activistes, et comme c'est le cas maintenant pour le projet Hidroaysén dans la région d'Aysén. L'accès aux informations et le débat public ont réussi à faire entendre la voix du citoyen ordinaire sur sa position face à ces développements, et de fait, des projets qui auparavant étaient approuvés sans autre forme de procès se trouvent à présent examinés par tous.

Billet de 1000 pesos  chiliens, portant la mention “Patagonie Sans Barrages”. Photo sur Flickr de soy elOjo (CC BY-NC-SA 2.0)
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