Nouveau rapport sur les pressions subies par les militants ukrainiens

Ukraine Women's March 2019

Kiev, Ukraine. Marche des Femmes 2019. Photo de UN Women/Volodymyr Shuvayev sur Flickr, CC BY-NC 4.0.

Depuis le soulèvement politique et populaire de 2013, l'Ukraine avance doucement dans sa lutte contre la corruption et dans sa numérisation des services publics, non sans quelques obstacles. Malgré ces progrès notables, les libertés et les droits humains restent précaires dans le pays.

Un nouveau rapport de suivi [en] du centre ZMINA pour les droits de l'Homme met en lumière la persécution persistante des militants et défenseurs des droits humains dans les régions d'Ukraine sous contrôle du gouvernement, indiquant les tendances majeures et soulignant les principaux cas de pression sur la société civile durant la période de janvier à mars 2021.

Ce rapport, préparé en partenariat le Comité Helsinki néerlandais et financé par l'Union Européenne, note qu'en tout, 30 cas de répression d'actions citoyennes ont été constatées durant le premier trimestre 2021, contre 26 cas à la même période l'an passé.

In the context of decentralization, mobilization of efforts in solidarity struggle with the consequences of the COVID-19 pandemic, socio-economic perturbations, the issue of persecution of activists and human rights defenders, as well as impunity for such persecution, becomes increasingly important for promoting and upholding human rights standards and protection of public interests.

Dans un contexte de décentralisation, de mobilisation solidaire face aux conséquences de la pandémie de COVID-19, de perturbations socio-économiques, le sujet de la répression des militants et défenseurs des droits humains, ainsi que l'impunité de ces persécutions, devient de plus en plus important pour promouvoir et maintenir des normes en matière de droits fondamentaux et de protection de l'intérêt public.

types of persecution_zmina

Les agressions physiques, les dégâts matériels et les tentatives d'intimidation figurent parmi les principales menaces auxquelles les militants doivent faire face en Ukraine. Infographie de ZMINA, capture d'écran du rapport de suivi disponible sur zmina.ua.

Parmi les incidents recensés au cours du premier trimestre 2021, les agressions physiques, la destruction ou l'endommagement de biens matériels des militants et les tentatives d'intimidation sont les plus fréquents, avec six cas pour chacune de ces catégories. ZMINA a également relevé cinq cas de campagnes de dénigrement, trois tentatives d'empêcher un rassemblement pacifique, deux instances de poursuites judiciaires, un cas d'atteinte à la vie privée et un cas de perquisition sans motif légal.

Infographic showing the most risky activities for civil society in Ukraine.

Quelles activités militantes présentent le plus de risques ? Infographie de ZMINA, capture d'écran du rapport disponible sur zmina.ua.

Le rapport montre que le militantisme anti-corruption, en faveur des droits des LGBT et de défense des droits des femmes sont les activités les plus à risque. ZMINA a constaté trois cas de répression dans chacune de ces catégories. Les auteurs admettent qu'il est « compliqué d'identifier un militantisme précis comme le plus à risque » étant donné qu'il y a souvent des chevauchements. L'opposition à des constructions illégales, la protection de l'environnement, la protection des droits des patients et celle des droits des journalistes comptent chacun un cas de persécution des militants.

Des menaces numériques

Le rapport fait également état de diverses menaces numériques à l'encontre de citoyens militants et de journalistes. Le Digital Security Lab [ukr], une association ukrainienne à but non lucratif qui suit ce genre d'incidents et en soutient les victimes, a constaté 24 cas au cours des trois premiers mois de l'année 2021 : six en janvier, douze en février et sept en mars.

Cette activité d'observation a permis d'enregistrer dix occurrences de phishing, dont une de grande envergure sur Telegram en janvier, sept cas de vol, de réinitialisation ou d'usage des mots de passe de comptes militants, deux cas d'interception de SMS (souvent utilisée pour contourner les authentifications à deux facteurs), deux incidents de piratage de site Internet, ainsi que le blocage de contenu ou de comptes personnels sur les réseaux sociaux. Des militants ont également rapporté avoir reçu des intimidations et des menaces par des biais numériques.

Qui sont ceux qui menacent les militants ukrainiens ?

Le rapport ZMINA met en exergue plusieurs catégories d'acteurs principaux faisant obstacle au travail des militants et des défenseurs des droits humains. Parmi eux, les législateurs qui discutent ou adoptent des lois discriminatoires envers la société civile : lois qui considèrent l'action militante comme du lobbyisme, lois relatives aux “agents étrangers” à la russe, ou menaçant le droit à manifester pacifiquement et la liberté d'association. Plusieurs incidents figurant dans le rapport concernent les forces de l'ordre et en particulier la réaction policière disproportionnée face à des manifestations pacifiques.

On note également de nombreuses instances de pression judiciaire, notamment de poursuites pénales à l'encontre de défenseurs des droits de l'Homme et de militants citoyens, à l'initiative de procureurs ou de particuliers. Les chercheurs montrent par ailleurs l'impunité de ces attaques contre ces activistes : des affaires connues d'attaques contre des militants (telles celles de Kateryna Handzyuk [en] or Iryna Nozdrovska, qui en sont toutes les deux mortes) restent irrésolues.

Une des autrices du rapport, Anastasia Moskvychova, a déclaré [ukr] sur la radio publique Hromadske Radio que l'impunité demeure un obstacle majeur à l'action des défenseurs des droits humains en Ukraine.

At the moment more attention is being drawn to the attacks on activists, so this may be why the number of reports is growing. But the statistics are very disappointing.

Une attention particulière est portée sur les attaques à l'encontre d'activistes en ce moment, c'est peut-être pour cela qu'il y a de plus en plus de signalements. Mais les chiffres sont très décevants.

Moskvychova estime [ukr] qu'il est d'autant plus important d'attirer l'attention sur les menaces et l'obstruction des activités militantes en Ukraine que « le but de la répression est de réduire les activistes au silence et de mettre un frein à leur travail ».

Un dernier rapport ZMINA à lire en entier ici [en].

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