Cet article a d'abord été publié sur le blog du Committee to Protect Journalists par le blogueur malgache Andriankoto le 2 octobre 2009. Traduit et publié avec l'autorisation du site. Note du traducteur : l'élection du président Ali Bongo a depuis été validée par le Conseil constitutionnel du Gabon.
“Voici quelques semaines que j'ai quitté le Gabon. Cela va faire deux mois depuis qu'ont eu lieu les élections pour le choix d’un successeur à Omar Bongo, qui a gouverné pendant 41 ans le quatrième pays producteur de pétrole d'Afrique. Des questions ne sont toujours pas clarifiées sur le nombre de bulletins de vote et le nombre de victimes tuées dans les violences post-électorales.
Jusqu'à cet été, je ne savais pas grand chose sur le Gabon, sauf quelques informations superficielles : que c’est un pays de 1,4 million d'habitants avec un PIB correspondant à celui du Portugal. Les choses ont changé le 3 juillet lorsque Lova Rakotomalala et moi, deux blogueurs de Madagascar, avons reçu un courrier électronique d’Alice Backer, ancienne responsable du projet Lingua et de Global Voices en français, nous proposant de couvrir l'élection présidentielle du Gabon, prévue pour le 30 août [les liens suivant sont en anglais, français, ou malgache].
J'ai accepté parce que j'avais besoin d'air frais. Après tout, comme blogueur de Global Voices en malgache, j'avais déjà vécu une expérience amère de la crise politique qui a déchiré mon pays, Madagascar, une île de l'océan Indien. Avec la plate forme de crise Foko-Ushahidi, qui permet aux simples citoyens d'envoyer par SMS des informations en temps réel, avec des informations publiées sur Twitter, et des sites internet locaux tels que Topmada, Lova, moi et d'autres blogueurs malgaches avions aidé à couvrir tous les aspects de la crise qui se déroulait. Ces témoignages ont même été cités par les médias internationaux étant donné que les médias traditionnels malgaches étaient divisés par des querelles partisanes.
Le Gabon, de son côté, n'est pas connu comme un pays à la pointe de la technologie. Moins de 6 % de la population a accès à Internet, selon InternetWorldStats. Alors qu'à Madagascar, la vive opposition de la population à la fermeture par notre ancien président Marc Ravalomanana de la chaine de télévision Viva a finalement provoqué son renversement, la censure des médias semble être la norme au Gabon depuis de nombreuses années, selon les organisations pour la liberté de la presse.
Néanmoins,en laissant l’hiver austral, les températures froides de Madagascar pour l'air chaud et humide de la capitale du Gabon, Libreville, au bord de la mer, juste au-dessus de l'Équateur, je savais que ces élections seraient historiques à cause du rôle sans précédent que joueraient les nouvelles technologies de la communication.
Vingt-trois candidats étaient en lice et plusieurs ont fait campagne sur leur site internet tels que Ali9, Mamboundou, AndreMbaObame ou Moubamba.
Les candidats ont été également mené activement campagne sur les réseaux sociaux en ligne. L'un des candidats, par exemple, le journaliste franco-gabonais Bruno Ben Moumbamba, a été parmi les plus actifs sur Facebook, Flickr, YouTube et Twitter. Ali Ben Bongo, candidat du parti au pouvoir, s’est distingué pendant sa campagne en envoyant à deux occasions différentes un texto personnel à tous les abonnés des trois principaux opérateurs mobiles au Gabon, Zain, Libertis et Moov.
Dans de nombreux bars (couramment appelé “maki”) du centre-ville de Libreville appelé Louis-ville, des personnes discutaient de tout autour d'une bière locale “Regab” et des plats de poisson braisé. Ali Bongo détenant le monopole des médias d'État, la plupart des stations de radio locales se sont orientées vers des émissions religieuses et de divertissement, et la poigné de stations de télévision partisanes étant contrôlées par l'élite politique, économique et religieuse, la plupart des Gabonais se sont tournés vers les médias internationaux pour avoir des informations objectives. Malheureusement, la couverture de l'électin par la presse écrite et les médias audiovisuels a été limitée par la censure, l’intimidation et la violence contre les journalistes.
Lorsque je suis arrivé à Libreville, j'ai rapidement constaté que les gens étaient réticents à exprimer librement leurs opinions en public devant quelqu'un qu'ils ne connaissaient pas. Même le coiffeur que je suis allé voir pour mes cheveux a poliment refusé de partager ses opinions sur les élections lorsque je lui ai posé la question, alors que la télévision dans son salon passait un reportage de Afrique24 sur les élections au Gabon. Bizarre !
Beaucoup de jeunes gens que j'ai rencontrés n'ont pas semblé très intéressés par Internet. En fait, les plus instruits m'ont dit qu'ils utilisent le Web exclusivement pour vérifier le courrier électronique et tchater ou visiter les sites de rencontres. D'autres semblaient motivés par l'idée de création de blogs mais voulaient être payés pour le faire. Néanmoins, avec un soutien, quelques personnes ont fait leurs premiers pas en utilisant le Web comme média social, et une poignée de nouvelles voix de citoyen émerge lentement. Le journaliste et militant Gaston Asséko a partagé son expérience du jour des élections, sur YouTube. Roger Edima Mavoungou Wilson, un professionnel de la communication, a ouvert un blog et est actif sur son compte Twitter. Régis Ngoma, un comédien gabonais, a même ouvert une chaine sur YouTube qui critique les élections.
Quoi qu'il en soit, nous avons eu beaucoup de difficultés à rédiger nos articles. Je me souviens de l'impossibilité dans laquelle je me suis trouvé de rédiger un texte quand les opérateurs de téléphonie mobile ont suspendu le service SMS lors des élections. En conséquent, un projet plate-forme de crise en ligne, initié par un mouvement de la diaspora gabonaise basé en France appelé Les anges gardiens du Gabon sur la plate frme Ushahidi, n’a jamais pu voir le jour. Néanmoins, les médias sociaux ont facilité le flux d'informations entre la diaspora gabonaise et ceux vivant sur place au Gabon. Selon le compteur Twirus le mot clé Gabon s'est placé en tête des tags sur le Twitter francophone après l’annonce des résultats.
Des doutes persistent sur les résultats des élections présidentielles et durant le recomptage des bulletins de vote, les journalistes ont été sous pression. [Durant le recomptage], un caricaturiste et blogueur gabonais, Patrick Essono, a été détenu pour avoir représenté deux policiers dans ses dessins. La veille, le rédacteur en chef du quotidien national d’Etat l'Union, Albert Yangari, a subi un interrogatoire pour avoir publié un interview des habitants de Port-gentil, qui déclaraient que plusieurs personnes avaient été tuées pendant les violences post électorales, en nombre supérieur à celui annoncé officiellement par le gouvernement. [Durant la première semaine d'octobre ], on a signalé que la maison de Jonas Moulenda, le journaliste qui avait fait l'interview, a été perquisitionnée par la police et qu'il a reçu des menaces de mort.
2 commentaires
Je pensais que Bongo était mort alors qu’à ma grande surprise , j’apprends qu’il est encore président du Gabon. C’est quoi ce délire??? Qu’en est ce qu’il disparaitra définitivement du Gabon et qu’on entendra plus jamais parler de lui!!!!