Il y a 12 jours que la Grande marche pour l'eau est partie, le 1er février 2012, des hauteurs de Celendín, Cajamarca, au Pérou, où sont situés les lacs menacés par le projet d'exploitation minière Conga [espagnol, comme tous les liens]. La marche s'est déroulée pratiquement sans incident, et elle est actuellement à mi-chemin de Lima, sa destination finale.
Pendant ce temps, les médias publient des reportages et des éditoriaux sur sa progression, sur le but réel de cette marche, en soulignant par-dessus tout ses affiliations politiques et idéologiques, alors que les porte-parole du gouvernement déclarent qu'en réalité “il y a un excès d'eau à Cajamarca “.
Les médias ne disposent pas de chiffres concordants sur le nombre de personnes qui sont parties de Celendín le 1er Février. Alors que Terra.pe parle de 200 personnes, EFE estime qu'elles sont 300. El Comercio évalue à 600 le nombre de paysans de la communauté qui ont commencé le voyage, et le RPP indique que 300 personnes sont arrivées à la Plaza de Armas de Cajamarca pour passer la nuit avant de continuer à marcher le lendemain.
Le blog Seamos un río (Soyons un fleuve) reproduit ce qui a été publié par Marcio Arana, un des organisateurs de la marche :
Salimos a las 4am, nos reunimos en la plaza de armas de Celendin. Líderes ronderos, mujeres, jóvenes, músicos, maestros, comunicadores, vamos llegando. No hace mucho frio y una suave llovizna nos anuncia que la tierra fértil la está esperando y que los pequeños ríos van a juntarse hasta formar el Gran Rio de Vida que es nuestra Marcha. […]
La noche anterior habían llegado los responsables de barrios trayendo sus aportes económicos para apoyar a los caminantes. Hasta la colecta de profesores, maestros católicos y una niña que en nombre de sus padres dona 20 nuevos soles son aplaudidos. En Lima no faltan políticos que se preguntan quién financia la marcha. Los políticos financiados por grandes grupos de poder económico jamás comprenderán la fuerza y el poder de las pequeñas donaciones como no están entendiendo el gran río que serán los pequeños riachuelos y manantiales.
Nous sommes partis à 4h du matin, et on s'est réuni sur la place d'Armes de Celendin. Patrouilleurs, femmes, jeunes, musiciens, enseignants, communicants, nous arrivons. Il ne fait pas très froid et une légère bruine nous annonce que la terre fertile nous attend et les petites rivières vont s'unir à nous pour former la Grande rivière de la vie qui est notre Marche. […]
La veille, les chefs de quartier étaient arrivés avec leurs contributions financières pour soutenir les marcheurs. Même la collecte des professeurs, des enseignants catholiques et d'une fillette qui a fait un don de 20 nouveaux Soles au nom de ses parents ont été applaudis. A Lima, il ne manque pas de politiciens qui se demandent qui finance la marche. Des politiciens financés par de grands groupes du pouvoir économique ne pourront jamais comprendre la force et la puissance des petits dons, tout comme ils ne comprennent pas le grand fleuve que deviendront les petits ruisseaux et sources.
Les premiers instants de la marche ont été enregistrés, comme on peut le voir dans ces vidéos de GobRegCajamarca et jampaoli. Il y avait aussi diverses déclarations, comme celle-ci, de l'utilisateur MetsaRiba qui recueille les mots d'un participant paysan :
Ou celle-ci montrant des femmes de Cajamarca scandant des slogans pro-eau :
Ce même jour, une autre marche a eu lieu à Cajamarca, la Marcha de los Cántaros (la Marche des cruches), où 2000 personnes ont défilé en faveur de la nature et de l'écologie, en protestant contre la pollution par les activités minières. Servindi a publié quelques photos pour son article sur le défilé de la solidarité qui s'est tenu à Lima, qui peuvent également être consultées sur une vidéo téléchargée sur YouTube. Une vidéo de l'itinéraire du le premier jour de la Marche pour l'eau, avec des photos des événements de la journée, a été publiée sur le blog de Celendín Libre :
10:30 a.m. Primer obstáculo, una tranquera particular en plena vía pública no deja el pase a ningún vehículo. Los manifestantes proceden a retirarla.
Arribo a la Laguna Cortada (a más de 3 800 m.s.n.m.), donde unas 300 personas dan inicio a la Marcha por el Agua con un rito simbólico de agradecimiento a la mamapacha y mamacocha, por comuneros del Ámaro.
10h30. Premier obstacle, un portail privé au milieu de la route principale ne laisse passer aucun véhicule. Les manifestants ont procédé à l'enlever.
Arrivée à la Laguna Cortada (plus de 3 800 mètres d'altitude), où quelque 300 personnes ont commencé la Marche pour l'eau avec un rituel symbolique pour rendre grâce à mamapacha et mamacocha [Déesses incas de la terre et de l'eau], réalisé par la communauté des paysans de Amaro.
Sur son blog, une “Mission internationale d'observation de la Grande marche nationale pour le droit à l'eau” a publié des informations sur le déroulement de la marche, ainsi que sur la surveillance de sa progression pacifique. Ils y partagent les principes et les objectifs de la mission et une liste des personnalités qui la soutiennent. Le premier jour de marche, ont-ils commenté :
La movilización también ha sido secundada en la región norteña de La Libertad, donde un grupo numeroso de campesinos inició una marcha hacia la ciudad de Trujillo desde las provincias andinas de Huamachuco y Santiago de Chuco.
En Lima, unas 300 personas, en su mayoría jóvenes y dirigentes estudiantiles, realizaron un Pasacalle para celebrar el arranque de la Marcha que culminó en la Plaza San Martín.
A Lima, environ 300 personnes, principalement des jeunes et des leaders étudiants,ont tenu un défilé dans les rues pour célébrer le début de la Marche qui a atteint la Plaza San Martín.
Le lendemain, au deuxième jour de la Marche, des participants en provenance de Celendín, Bambamarca et d'autres villes ont quitté Cajamarca pour Ciudad de Dios dans la région de La Libertad, où ils ont passé la nuit, mais pas avant d'avoir dépassé la ville de Choropampa. C'est une ville où, en l'an 2000 environ 151 kg de mercure appartenant à la mine de Yanacocha ont été déversés, ce qui avait affecté gravement la santé de la population locale. La mission d'Observation a fait un reportage de la journée sur son blog. Des vidéos sur le départ de Cajamarca, dans la matinée, ont également été téléchargées sur l'internet.
Le troisième jour, les marcheurs partis de Ciudad de Dios, ont dépassé Pacasmayo et sont arrivés à Trujillo, où ils ont été rejoints par d'autres délégations venues de différentes villes de la région de La Libertad, au nombre estimé à environ 2000. Ces délégations ont été accueillies par environ 5000 personnes, puis un rassemblement a eu lieu, avec des débats, la présentation des pétitions et d'autres activités selon le programme.
Des photos sur les trois premiers jours de la Marche peuvent être consultées dans un billet sur le blog El Maletero “Red Verde Cajamarca” (Réseau vert de Cajamarca). Pendant ce temps le blog du Frente de Defensa Ambiental (Front pour la défense de environnement) de Cajamarca partage d'autres photos de la journée à Trujillo. Un billet [en anglais] sur le blog “¡Conga no va!” (“iConga ne se fera pas!”) conduit vers une série de photos sur Flickr prises à Trujillo.
Sur Twitpic@, YoDash a publié quelques photos de la manifestation de Plaza de Armas à Trujillo, comme celle-ci :
Pendant ce temps, on rapporte sur la page Facebook de la Marche pour l'eau qu'à Trujillo des tracts diffamatoires ont été distribués, essayant de lier la Marche et ses organisateurs avec des mouvements terroristes. En dépit de cela, la protestation a continué sur la Plaza de Armas jusqu'à la nuit avec différentes performances musicales, dont certaines liées à la Marche et les circonstances qui l'entourent, comme on peut le voir dans cette vidéo postée sur YouTube par l'utilisateur Fuzzerjoga:
Le rapport quotidien de la Mission d'observation signale quelques incidents au cours d'une grève organisée à Huarmey :
La Comisión Nacional Organizadora de la Gran Marcha Nacional del Agua ha reportado y denuncia una acción represiva por parte de efectivos policiales. El jueves en la noche, en Huarmey, uno de los puntos de concentración previstos en la Marcha, se produjeron enfrentamientos entre la policía y la población en el marco de un paro de 48 horas contra la minera Antamina, a la que acusan de contaminar el acuífero que les provee de agua potable.
Le quatrième jour de marche, samedi 4, les manifestants sont restés à Trujillo pour se reposer, mais ils ont aussi continué à organiser des débats et des prises de contact avec la population locale. Le dimanche 5, le cinquième jour de la marche, le groupe est reparti pour la ville de Chimbote. La page Facebook de la marche a téléchargé une vidéo de l'arrivée au village de Santa, juste avant Chimbote. Une fois dans la ville, ils ont rencontré le syndicat des pêcheurs, ensuite ils sont partis pour la ville de Casma, en suivant la route du sud vers Lima.
Pendant ce temps, le quatrième rapport de la Mission d'observation a souligné l'attitude du gouvernement envers le problème des sociétés minières et de l'eau, se basant sur divers communiqués et déclarations, y compris :
- El pronunciamiento del Colegio de Ingenieros del Perú, señalando que: “El Gobierno Peruano, desde la época republicana y hasta la fecha, no tiene una visión de desarrollo sostenido, ya que ha cimentado gran parte de su crecimiento en la explotación minera”.
- El presidente Ollanta Humala señaló que “ningún proyecto se paralizará por la consulta previa, y que esto no es un pretexto para que se detenga la inversión”, en referencia a la falta de la reglamentación de la ley que debía estar lista en diciembre pasado. En agosto del año pasado, sin embargo, el propio presidente escribía en twitter: “El derecho a la consulta previa sobre del desarrollo de los pueblos indígenas es un signo más de inclusión social. Forjamos un Perú para todos”
En este contexto, parecen razonables las palabras de Emma Gómez, de Cooperacción: “hay una lectura equivocada del presidente Humala sobre la Consulta Previa, la cual está siendo considerada como un obstáculo para la inversión privada más que un imperativo para que las empresas extractivas cumplan con los estándares ambientales y sociales de una inversión seria y que respeten los derechos de las poblaciones en las zonas de influencia”.
- La déclaration de l'Association des ingénieurs du Pérou, indiquant que : «Le Gouvernement péruvien, depuis le début de l'ère républicaine jusqu'aujourd'hui, n'a jamais eu une vision de développement durable, étant donné qu'une grande partie de la croissance du pays a été basée sur l'exploitation minière.”- Le Président Ollanta Humala a indiqué que “aucun projet ne sera paralysé par des consultations préalables et que ce ne pouvait être un prétexte pour mettre un terme au projet d'investissement“, en référence à l'absence de réglementation régissant la mise en œuvre de la loi, qui aurait dû être prête en décembre dernier. En août de l'année dernière, cependant, le Président lui-même avait écrit sur Twitter : “Le droit à la consultation préalable sur le développement des communautés autochtones est un signe de plus grande inclusion sociale. Créons un Pérou pour tous.”Dans ce contexte, les mots d'Emma Gómez de Cooperacción semblent raisonnables : «Le Président Humala a une mauvaise interprétation de la Consultation préalable, en la considérant comme un obstacle à l'investissement privé plutôt qu'un impératif pour les entreprises extractives pour répondre aux normes environnementales et sociales des investissements sérieux et respecter les droits des populations des zones touchées”.