Les chevaux sauvages de Livno, mustangs de la Bosnie-Herzégovine

Des chevaux sauvages de Livno, en Bosnie-Herzégovine. Photo d'Armin Durgut/Balkan Diskurs, reproduite avec autorisation.

Cet article écrit par Sanela Tufekčić est initialement paru sur le site de Balkan Diskurs [en], un projet initié par le centre de recherche postconflictuelle [en] (PCRC). Global Voices a republié une version révisée dans le cadre d'un accord de partage de contenu.

Sur les contreforts du mont Cincar, non loin de la ville de Livno dans le sud-ouest de la Bosnie-Herzégovine, vivent environ 400 chevaux sauvages. Pendant près de 50 ans, ils se sont adaptés au climat rigoureux et ont survécu aux braconniers et aux prédateurs. Sur fond de vastes pâturages et de forêts, ces créatures majestueuses constituent un phénomène unique dans cette région d'Europe.

Semblables aux mustangs des prairies américaines, ces descendants d'animaux domestiqués qui ont été importés en Amérique du Nord par les Espagnols et sont retournés à la vie sauvage, les chevaux sauvages de Livno sont en fait des chevaux féraux. La seule race de cheval réellement sauvage existant encore à l'heure actuelle est le cheval de Przewalski [fr], ou cheval sauvage de Mongolie, une espèce rare et en voie de disparition, originaire des steppes de l'Asie centrale. [Une étude génétique publiée en 2018 a cependant mis en doute cette hypothèse, avançant que le cheval de Przewalski serait un descendant de chevaux domestiqués par la culture Botaï]

Jusque dans les années 50, leurs ancêtres étaient utilisés à des fins agricoles, mais suite à la mécanisation des moyens de production, leurs propriétaires les ont abandonnés faute de pouvoir assurer leur entretien devenu trop coûteux.

Bien qu'ils se regroupent essentiellement dans la région du plateau de Krug, au pied du mont Cincar, les chevaux sauvages de Livno ont également été aperçus traversant le col de Borova Glava entre les régions de Livno et de Kupres.

La saison estivale est l'occasion pour les gens qui parcourent la montagne de Cincar d'observer ces chevaux pendant leur déplacement en quête de nourriture. Ces derniers doivent en outre traverser la route principale car, dans une région où il n'y a ni lacs ni rivières, c'est là que se trouvent les deux seuls points d'eau. Ceux-ci ont été spécialement créés pour les chevaux par les membres de l'Association environnementale et alpine de Borova Glava [hr], pour pallier ce manque.

Des chevaux sauvages de Livno se désaltérant à un point d'eau. Photo d'Armin Durgut/Balkan Diskurs, reproduite avec autorisation.

L'habitat karstique des chevaux manque généralement de sources d'eau. Ils se rassemblent alors aux points d'eau disponibles, créés et entretenus par des militants écologistes. Photo de Sanela Tufekčić, sous licence CC BY 3.0.

Toutefois, la traversée de la route principale n'est pas sans risque. En juillet 2015, un véhicule municipal transportant à son bord le maire de Knin, une ville croate juste de l'autre côté de la frontière, a percuté l'un de ces chevaux sauvages [hr], qui s'est retrouvé avec une patte fracturée. Il est très difficile pour un cheval de récupérer après une telle blessure, alors comme souvent dans ce genre de situation, l'animal a dû être euthanasié.

Néanmoins, cet événement tragique a entraîné des retombées positives. Depuis cet incident, la harde de chevaux a suscité un vif intérêt du public, et l'Association environnementale et alpine de Borova Glava a engagé des mesures supplémentaires pour veiller à leur protection et à leurs soins.

A brown-white-black foal standing in the foreground, with a white horse in the back, on a mountain near Livno in Bosnia and Herzegovina.

Un poulain sauvage de Livno. Photo de Sanela Tufekčić, sous licence CC BY 3.0.

En 2013, les autorités locales [bs] de Livno ont adopté un arrêté interdisant la chasse des chevaux. Les braconniers avaient l'habitude de tuer les chevaux pour leur viande, mais depuis la mise en vigueur de cette nouvelle réglementation, aucun acte de braconnage n'a été rapporté. En revanche, les chevaux restent vulnérables face aux animaux prédateurs, comme en témoignent les quelques attaques de loups dont la harde a été victime.

L'arrêté a été temporairement suspendu en décembre 2017 [bs], lorsque la municipalité a demandé à l’État de participer au financement de la protection de ces chevaux. Cette décision a fait suite à la hausse des demandes d'indemnisation [bs] des conducteurs victimes d'accidents de la route impliquant les animaux de la harde. Le risque est d'autant plus important en hiver, puisque les chevaux vont sur la route pour lécher le sel utilisé par les agents de la route pour faire fondre le verglas.

Le nombre de chevaux sauvages de Livno est passé de 286 en 2013 à 418 en 2019, avec 65 nouveaux poulains rien qu'en 2019. Ils disposent actuellement de 145 kilomètres carrés où ils peuvent paître en toute liberté, ce qui suffit pour maintenir la population actuelle, et un nouveau point d'eau est en cours de construction au pied du mont Cincar.

Des chevaux sauvages qui broutent sur le mont Cincar, près de la ville historique de Livno. Photo de Sanela Tufekčić, sous licence CC BY 3.0.

Horse silhouettes with a background of blue sky and white clouds on Mount Cincar, near Livno in Bosnia and Herzegovina.

Des chevaux sauvages de Livno broutant sur le mont Cincar, tout près des nuages. Photo de Sanela Tufekčić, sous licence CC BY 3.0.

Les chevaux sauvages de Livno sont devenus l'une des attractions touristiques les plus prisées de la région, et de nombreux visiteurs du monde entier se déplacent pour voir et prendre en photo les rares spécimens de chevaux sauvages encore en vie en Europe. Sept hardes différentes ont été identifiées ainsi que quelques chevaux solitaires qui ont décidé d'errer seuls dans ces paysages montagneux.

Un cheval sauvage de Livno sur la montagne de Cincar, en Bosnie-Herzégovine. Photo d'Armin Durgut/Balkan Diskurs, reproduite avec autorisation.

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