Les préparatifs pour les élections générales continuent malgré l'insécurité grandissante en RDC

Capture d'écran de la chaîne YouTube de France 24

Des élections générales sont prévues fin décembre en République Démocratique du Congo (RDC) mais une partie de la population pourrait ne pas jouir du droit de vote à cause de l'insécurité qui secoue l’Est du pays.

La Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de la République Démocratique du Congo est à quelques semaines de l'organisation d’élections générales (présidentielle, législatives, provinciales et communales) le 20 décembre 2023 dans un pays qui compte plus de 103 millions d'habitants.

Selon la Ceni, la liste définitive des candidats à l'élection présidentielle sera publiée le 18 novembre. Pour le moment, 24 candidats, dont une seule femme,  Marie-Josée Ifoku, présidente de l’Alliance des Élites pour un Nouveau Congo (AENC) sont en lice pour l'élection présidentielle, comme ce fut le cas lors des élections présidentielles de 2018.

Citée dans une publication du BBC, la candidate Ifoku indique que :

Je suis la première personne à évoquer la rupture. En 2018, je parlais de la rupture. Le système et l'état de prédation mis en place depuis l'État indépendant du Congo se perpétuent malheureusement à travers nos dirigeants depuis l'indépendance, jusqu'à maintenant. C'est comme si le peuple est une proie pour ceux qui dirigent. Nous voulons rompre avec ce système.

Le 27 octobre 2023, la cour constitutionnelle de Kinshasa, capitale du pays a débuté l’examen des contentieux sur certaines candidatures de l'élection présidentielle. Le président sortant Félix Tshisekedi de l’Union pour la démocratie et le progrès social (UDPS) au pouvoir depuis janvier 2019, et les principaux opposants dont M0ïse Katumbi du parti Ensemble pour la République, Martin Fayulu du parti Engagement pour la Citoyenneté et le Développement (ECiDé) et le Docteur Denis Mukwege, candidat indépendant, font parti du lot des 24 candidats retenus par la Ceni. Une liste définitive sera publiée après cet examen du contentieux devant la haute cour. Les juges doivent se prononcer le 18 novembre, la veille du début officiel de la campagne.

Moïse Katumbi, est l’un des principaux challengers du président sortant. La candidature de l’opposant et homme d’affaires avait été contestée par deux requêtes sur allégations de nationalité étrangère.

Pour les législatives et les autres élections, plus de 23,000 candidats se disputent les 500 sièges. En effet des milliers de Congolais et Congolaises se sont portés candidats aux postes de députés provinciaux et de conseillers municipaux.

Tandis que les préparatifs pour la tenue de ce scrutin multiple sont lancés, l'Est du pays fait toujours face à l'insécurité due à un conflit armé entre les groupes rebelles.

Pour en savoir plus, Lire : La République Démocratique du Congo prépare les élections de décembre 2023 dans un contexte sécuritaire inquiétant

Bouleversement dans l'enrôlement et insécurité

La RDC est aussi le pays le plus peuplé de l'Afrique francophone, mais 6,9 millions d'habitants constituent des déplacés internes, selon une publication de l’Organisation Internationale de la Migration (OIM) sur le réseau X (ex-twitter):

Ce grand nombre de déplacés est dû au regain des violences et à la recrudescence des conflits au Nord-Kivu dans l'Est du pays, entre les forces armées du pays et la rébellion du Mouvement du 23 mars (M23), ainsi que d'autres groupes armés.

Le M23 est principalement composé d'anciens soldats de l'armée régulière du pays s'opposant au gouvernement en raison de la marginalisation de leur groupe ethnique Tutsi (aussi présent au Rwanda voisin). Ce mouvement est actif dans la région du Nord-Kivu suite à une guerre de Kivu depuis 2004 qui malgré des accords de paix en 2009, n'est toujours pas résolue.

La RDC et les Nations-Unies ont longtemps accusé le Rwanda de soutenir le Mouvement M23, ce que réfute les autorités rwandaises. La présence de ces groupes rebelles dans l'Est du pays complique la tâche des agents de la Ceni sensés enrôler les citoyens pour inscrire leur noms sur les liste d'électeurs pour les scrutins à venir. En RDC, l'élection présidentielle se fait au suffrage universel.

Les combats empêchent le processus électoral, comme l'explique un rapport de l’International Crisis Group ( ICG) :

Les combats dans l’est du pays et dans d’autres régions ont privé plus d’un million de citoyens de leur carte d’électeur.

Dans une intervention le 17 octobre 2023 devant le conseil de sécurité de l'Organisation des Nations-Unies (ONU), relayé par le site OnuInfo, Huang Xia, l'envoyé spécial de l’ONU pour la région des grands lacs d’Afrique, appelle la communauté internationale à un soutien accru pour répondre à l’escalade des hostilités à l’est de la RDC. Dans son discours, il exprime sa profonde préoccupation :

(…) Le risque d’une confrontation directe entre la RDC et le Rwanda qui continuent de s’accuser mutuellement de soutenir des groupes armés ennemis – le M23 d’un côté, les Forces démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), de l’autre – demeure lui bien réel. Le renforcement militaire des deux pays, l’absence d’un dialogue direct de haut niveau et la persistance des discours de haine, sont autant de signaux inquiétants que nous ne pouvons ignorer.

L'insécurité est l’un des grands enjeux des élections et la situation humanitaire continue de se détériorer. Dans un communiqué en date du 30 octobre, l’Organisation Internationale de la Migration (OIM) indique qu’une grande majorité des déplacés a besoin d’une aide humanitaire.

Avec le conflit en cours et l’escalade de la violence, la RDC est confrontée à l’une des plus grandes crises de déplacement interne et humanitaire au monde.

Une opposition divisée

L'opposition apparaît plus divisée avant le cycle électoral, et selon plusieurs observateurs, cette multitude de candidatures pourrait faciliter la victoire du président sortant.

Dans son rapport qui analyse la situation pré-électorale publié le 30 octobre 2023, ICG estime que l'opposition pourrait contester plusieurs étapes du processus électoral.

L'opposition, confrontée à une répression accrue du gouvernement et à une commission électorale nationale indépendante (Ceni) qu’elle considère comme favorable au parti au pouvoir, est tentée de rejeter chaque étape de ce processus.

L’organisation avertit que le risque de violence localisée est élevé.

Un résultat présidentiel serré ou contesté pourrait également conduire à une crise nationale, comme ce fut le cas en 2018.

Pendant ce temps, six candidats à la présidentielle émettent des doutes sur le processus électoral auprès de la Ceni. Il s'agit de Martin Fayulu, Moïse Katumbi, Denis Mukwege, Seth Kikuni, Marie José Ifoku et Franck Diongo. Ils exigent que la Ceni affiche les listes électorales dans chaque bureau de vote, conformément à la loi électorale. Ils en appellent aussi à un dialogue avant la tenue des scrutins et ainsi assurer des élections pacifiques.

Pour atténuer les risques de violences, ICG suggère que:

Le gouvernement devrait veiller à ce que tous les partis puissent faire campagne sans subir d’intimidation ni de restrictions injustifiées.

L'organisation spécialisée dans l’analyse des conflits recommande aussi  que :

Le gouvernement devrait s’assurer que la Ceni, qui doit elle-même rémunérer son personnel et lutter contre l’extorsion des électeurs, soit financée de manière adéquate.

Au delà des divisions politiques et des difficultés d'organiser un scrutin pour tous,, es principaux enjeux de cette élection pour la population sont la lutte contre la corruption (166è rang sur 180 pays selon l’indice de perception de la corruption) et la pauvreté, la redistribution de riches ressources minières , la démocratie, et la sécurité.

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