L’article d'origine a été publié en anglais le 20 octobre 2020.
Sauf mention contraire, tous les liens renvoient vers des pages en anglais.
Depuis le 9 octobre, la jeunesse nigériane a été à l'origine de manifestations pacifiques dans tout le pays contre la brutalité policière instituée par la Brigade spéciale de répression des vols, plus connue sous le nom de SARS.
Cependant, aux premières heures du 19 octobre, les rassemblements ont sombré dans le chaos lorsque des voyous ont attaqué des manifestant·e·s devant le siège de la Banque centrale nigériane à Abuja, la capitale du Nigeria. L'attaque s'est déroulée lors d'une veillée pour les personnes tuées par cette brigade spéciale, dans le cadre du mouvement anti-SARS.
Des hommes armés non identifiés ont brûlé les voitures des manifestant·e·s, selon des témoins oculaires sur Twitter.
Everybody wake up. It’s happening. Abuja protesters are unsafe. Gunshots are being fired, cars are being set on fire and hoodlums are physically attacking and beating up protesters at CBN headquarters as we speak. @EndSarsResponse please help! #EndSARS
— ULOMA (@ulxma) October 19, 2020
Que tout le monde se réveille. La situation actuelle est critique. Les manifestant·e·s ne sont pas en sécurité à Abuja. En ce moment même, au siège de la Banque centrale du Nigéria, des coups de feu ont retenti, des voitures sont en train d'être brûlées et les voyous agressent physiquement et tabassent les manifestant·e·s. @EndSarsResponse nous avons besoin d'aide ! #MettezFinAuSARS
Les forces anti-émeutes ont ensuite été déployées dans la capitale.
Plus tard dans la journée, des voyous sont arrivés en nombre pour submerger les manifestant·e·s pacifiques anti-SARS, et ont également détruit les murs de la prison d'Oko à Benin city, dans l'État d'Edo, au sud du Nigeria, libérant ainsi des détenus.
Le vice-gouverneur de l'État d'Edo, Philip Shaibu, a confirmé que ces voyous avaient détourné la manifestation anti-SARS à Benin City.
Chaos chaos and more chaos#EndSARS #Beninprotest https://t.co/Lj19OhTZeR pic.twitter.com/mWuQmxvfni
— Meeemeee (@Miraxcle__) October 19, 2020
Le chaos, le chaos et encore le chaos #MettezFinAuSARS #ManifestationdeBenin[City]
Le gouvernement de l'État d'Edo a instauré un couvre-feu pour une durée de 24 heures, qui est entré en vigueur le 19 octobre à 16 heures, heure de l'Afrique de l'Ouest.
Le lendemain, le 20 octobre, le gouverneur de l'État de Lagos, Babajide Sanwo-Olu a instauré un couvre-feu pour une durée de 24 heures dans l'État, affirmant que « des criminels et des mécréants » avaient détourné la manifestation pour « semer le chaos ». De même, le commandement de la police de l'État de Lagos a également interdit toutes les manifestations dans l'État.
Hoodlums in Orile Iganmu (Lagos) lynched a police officer after he killed a young man. They then set a police station on fire. All events around this must be condemned unreservedly as they are atrocious and barbaric.
Peaceful protesters please stay away from these areas #EndSARS
— Fakhrriyyah (@FakhuusHashim) October 20, 2020
À Orile Iganmu (Lagos), des voyous ont lynché un officier de police après qu'il ait tué un jeune homme. Ils ont ensuite mis le feu à une station de police. Tous ces évènements doivent être condamnés sans aucune réserve, car ils relèvent de l'atrocité et de la barbarie.
Les manifestants pacifiques sont priés de se tenir à l'écart de ces zones #MettezFinAuSARS
Au premier abord, les incidents ayant eu lieu à Abuja, à Benin city et à Lagos ont un point commun : des voyous ont usé de la violence, ont forcé les manifestant·e·s pacifiques à quitter les lieux et immédiatement, les autorités nigérianes ont réprimé les actions de masse menées par les manifestant·e·s pour exprimer leur colère contre la brigade SRAS et la pratique générale des violences policières envers la jeunesse nigériane.
Les meurtres de Lekki
Dans un contexte de panique et de peur grandissantes au cours des dernières 24 heures [entre le 19 et le 20 octobre, ndlt], les agents de sécurité ont tiré sur des manifestant·e·s vers 19 heures, heure de l'Afrique de l'Ouest, le 20 octobre, au péage de Lekki, à Lagos, rapporte Bloomberg.
Des témoins oculaires rapportent que les agents de sécurité ont éteint les lumières du péage et ont tiré sans discernement.
Can we make this go viral??????
PLEASE GUYS!!! THEY ARE NOT SLOWING DOWN WITH THE SHOOTING IN LEKKI. PEOPLE ARE DYING!!! #EndSars pic.twitter.com/5FeaMtJsUH
— Idris (@Crhedrys) October 20, 2020
Peut-on rendre ceci viral??????
S'IL VOUS PLAÎT!!! ILS TIRENT SUR TOUT CE QUI BOUGE À LEKKI. DES GENS MEURENT!!! #MettezFinAuSARS
Les soldats ont bloqué les issues et auraient déjà tué trois personnes, selon un témoin oculaire qui a publié l'information sur Twitter :
The military have shot 3 people at lekki toll gate and carried their bodies to their front. They’re telling everyone to go home while also blocking their exit points !!! This is a bloody execution box #ENDSARS
— ebele. (@ebelee_) October 20, 2020
Les militaires ont tué 3 personnes au péage de Lekki et ont transporté leurs cadavres jusqu'à leur front. Ils demandent à tout le monde de rentrer chez eux tout en bloquant les issues !!! C'est une chambre d'exécution sanglante. #MettezFinAuSARS
L'organisation de la société civile Enough is Enough a décrit cet événement comme une déclaration de guerre aux citoyens :
The Nigerian government under the leadership of @MBuhari @ProfOsinbajo @jidesanwoolu has declared a war on the people they swore to protect. #EndSARS
— EiE Nigeria (@EiENigeria) October 20, 2020
Le gouvernement nigérian, sous la férule de @MBuhari @ProfOsinbajo @jidesanwoolu a declaré une guerre aux personnes qu'il avait juré de protéger. #MettezFinAuSARS
Nicholas Ibekwe, un utilisateur de Twitter, a tweeté que les meurtres lui semblaient prémédités [tweet supprimé] :
The short notice for the curfew and the removing of the CCTV point to the fact that the Lekki Toll Gate Massacre was pre-planned.
— Nicholas Ibekwe (@nicholasibekwe) October 20, 2020
Le couvre-feu instauré presque sans préavis et la suppression de la vidéosurveillance montrent clairement que le massacre qui s'est produit au péage de Lekki était planifié à l'avance.
Répression des jeunes sòrò sókè — « Élevez la voix »
Les manifestations de la jeunesse nigériane contre les violences policières de la SRAS ont défié toute attente. Tous les efforts visant à affaiblir le mouvement ont échoué lamentablement.
Organisé en groupe, le mouvement a présenté un front commun qui a empêché le gouvernement de faire taire les leaders ou de les soudoyer.
Malgré la brutalité des agents de sécurité nigérians à l'égard des manifestants, les jeunes n'ont pas reculé, ils ont plutôt organisé leur propre sécurité pour se protéger pendant la manifestation.
The most compelling element of the #EndSARS protests has been the powerful images and this one is my favorite. It's resonant & captures the movement – two young, carefree women running from a police tank, with one of them defiantly posing. Peep the NASS dome in the background. pic.twitter.com/klZlinAi0Y
— Chris O. Ògúnmọ́dẹdé (@Illustrious_Cee) October 15, 2020
L'aspect le plus convaincant de ces manifestations #MettezFinAuSARS ont été les images puissantes, et celle-ci est ma préférée. Elle est retentissante et capture le mouvement – deux jeunes femmes insouciantes fuyant un char de police, l'une d'entre elles posant avec défi. Regardez le dôme de la NASS en arrière-plan.
Leur organisation, très réussie à travers le pays, a reçu des éloges des chefs religieux qui ont soutenu ces manifestations.
Le mouvement pacifique « sòrò sókè » ou « élevez la voix » contre les brutalités policières a dévoilé les dessous nauséabonds de la mauvaise gouvernance du Nigeria.
Les autorités nigérianes, plutôt que de céder aux demandes des manifestants, ont décidé de réprimer avec violence les protestations contre l'injustice.
Malgré les diverses provocations, les manifestant·e·s n'ont pas usé de la violence. Par exemple, le manifestant Anthony Onome est mort à Abuja le 18 octobre après avoir été poignardé par des voyous. Amnesty International a également rapporté que des manifestant·e·s et des journalistes avaient été agressé·e·s physiquement par la police.
With your thugs, you rigged your way to power by intimidating voters and diverting ballot boxes.
With your thugs, you're injuring and killing innocent #EndSARS protesters.
Can you really do something without your thugs? Like, what would you ever do without them?
— ‘Fisayo Soyombo (@fisayosoyombo) October 19, 2020
Avec vos voyous, vous avez truqué votre accès au pouvoir en intimidant les électeurs et en détournant les urnes.
Avec vos voyous, vous blessez et tuez des manifestant·e·s #EndSARS innocent·e·s.Pouvez-vous vraiment faire quelque chose sans vos voyous ? Que feriez-vous sans eux ?
Cela a alimenté les soupçons selon lesquels l'invasion de voyous dans des manifestations pacifiques à Abuja, Lagos et Benin city aurait été initiée par des acteurs étatiques pour discréditer les manifestations #EndSARS.
#EndBadGovernanceinNIGERIA pic.twitter.com/wbzcL7pHcb
— #STOPAUXVIOLENCESPOLICIERES ?? (@DONJAZZY) October 20, 2020
#StopALaMauvaiseGouvernanceAuNigeria
— #STOPAUXVIOLENCESPOLICIERES ?? (@DONJAZZY)
Par conséquent, le couvre-feu est une ruse pour soumettre le mouvement. Qu'est-ce qui est plus facile, céder aux revendications des manifestant·e·s ou endiguer la violence perpétrée par les responsables de l'État ?
Curfew in Lagos was the final move in the playbook.
The script and the acting was well delivered by the government. Nice game? but you people have not won.
— Alex Oluwatobi (@alexlobaloba) October 20, 2020
Le couvre-feu à Lagos était l'objectif final de la stratégie du gouvernement.
Le scénario et la mise en scène des acteurs ont été bien exécutés par le gouvernement. Bien joué? Mais vous n'avez pas gagné.
La prochaine manifestation pour lutter contre les violences policières pourrait ne pas être aussi pacifique que celle du mouvement anti-SRAS.