La majorité des billets de la blogosphère libanaise reflètent l’atmosphère d’anxiété, de pessimisme, et de méfiance qui plane sur l’humeur des libanais actuellement. Voici une revue de quelques uns de ces billets. J’ai essayé d’y inclure un ou deux billets plus optimistes, mais ils ne représentent pas l’atmosphère générale.
Commençons par rappeler que le Liban a perdu la semaine dernière Joseph Samaha, un éditorialiste et analyste politique respecté. Beaucoup de blogueurs ont écrit sur cette personnalité et son œuvre. Jamal Ghosn [En]lui a consacré un billet qui commence ainsi :
« La vie continue, mais elle ne doit pas devenir une vie plus bête, moins bien informée et plus pauvre mentalement. Nous avons eu le privilège d’être collectivement enrichis, chaque jour, par une lecture de dix minutes qui contenait des décennies de culture, une bibliothèque de philosophie, et un œil stratégique qui voyait au-delà de tous les horizons. Aucune plume ne peut combler ce vide. Chacun d’entre nous doit compenser seul un petit peu de cette perte » .
Il est peut être difficile de croire que Les Libanais sont d’humeur à écouter des chansons d’amour après les dernières nouvelles du pays, mais à lire le billet de A Diamond’s Eye View of The World [En] on serait tenté d’imaginer Beyrouth comme une ville enveloppée d’un nuage de musique :
« Le Liban est un pays de musique : où que l’on aille, on entend de la musique ,dans les voitures qui passent, les restaurants, derrière les fenêtres des appartements. Mon moment musical favori arrive tôt le matin, quand je passe devant les soldats stationnés à différents endroits de la ville. Ils écoutent de la musique depuis leur téléphone mobile – les dernières chansons d’amour en arabe et les derniers tubes de hip hop américain. Chaque homme que je croise est enveloppé par son petit nuage personnel de musique. Quand une femme passe devant eux, ils se mettent soudain à chanter quelques paroles de vieilles ballades, le refrain de vieilles chansons d’amour. C’est tellement mieux que d’être sifflée dans la rue, ou même que ces mémorables apostrophes qu’on peut entendre à New-York, comme « Dieu te bénisse ainsi que la mère qui t’a fait naître »”.
Passons à la politique, avec Sophia [En] qui voit que le nouveau tournant de la politique étrangère des Etats Unis – organiser une conférence pour stabiliser l’Irak- prend par surprise ses alliés au Moyen Orient. Après une longue analyse, elle conclut :
« Il n’y a pas de tournant dans les derniers développements en date de la politique étrangère des Etats-Unis. Ce que nous voyons est une administration américaine affaiblie, à l’étranger comme dans son pays, en train d’essayer de poursuivre sa politique guerrière par d’autres moyens, même si c’est au détriment de la stabilité de tout le Moyen Orient ».
Une nouvelle vague d'optimisme, très mêlée néanmoins de pessimisme , se manifeste au Liban à l’approche du sommet Iran-Arabie Saoudite et du prochain sommet arabe. Abu Kais[En]réfléchit aux alternatives qui s’offrent aux différentes parties si le sommet échoue :
« Une vague d’optimisme prudent a saisi la scène politique libanaise dans les jours précédant le sommet Iran-Arabie Saoudite à Ryad. Des prédictions de règlement imminent du « dossier libanais » avant le sommet arabe du 28 mars ont envahi les médias libanais. Néanmoins, chaque bord fait allusion à un plan B, si les Saoudiens et les Iraniens ne parviennent pas à un accord sur les détails.[…] Je pense que nous sommes de facto face à une partition du pays en deux états, à l’effondrement de l’armée, et à un ou deux gouvernements prétendant être le seul légitime. Le chaos est le meilleur antidote à un état de droit, et au projet de tribunal international pour juger les assassins de Hariri ».
The Grateful Arab[En] analyse la situation actuelle au Liban à travers une perspective historique, et après avoir suggéré des solutions à ses problèmes, il décrit le Liban d’aujourd’hui comme :
« Un immense labyrinthe, où nous sommes tous perdus , surtout ceux qui prétendent ne pas l’être grâce à leurs convictions. Nous sommes incapables d’en atteindre le centre, nous errons sans but, essayant de retrouver notre chemin. Certains d’entre nous se découragent et sortent définitivement, d’autre se lassent et décident de rester dans l’impasse où ils se trouvent, en ignorant ou en combattant ceux qui sont coincés dans d’autres impasses ».
Certains leaders libanais se sont récemment rendus aux USA, où ils ont rencontré le Président Bush, ou des officiels américains. On leur a promis de l’aide. Leila commente ces promesses ainsi que des « coups fourrés de la CIA” au Liban et dans la région:
« Les dirigeants actuels de l’Amérique sont malades, irresponsables, idiots, et le Libanais qui croit que ces gens vont le protéger et l’aider se fait des illusions ».
Pour finir, Angry Anarchist [En]décrit la ville qu’elle aime dans un billet très drôle, dans un style ironique « Pourquoi-j’adore-détester-Beyrouth ». Voici deux échantillons de ses raisons d'aimer-détester Beyrouth :
1- Le Beyrouth de (feu) l’arabisme, où les habitant affirment que l’arabisme existe encore tout en psalmodiant “Allah, Hariri, Tarik Jdide” ou “Allah, Nasrallah, wl Dahiye kella” ou “Aounak jeyi min Allah?” etc. etc. Si vous pensez que nous ne sommes pas differents, nous sommes quand même la patrie d’une population importante de clowns qui affirment que Beyrouth est (et non pas était) phénicienne, et que le Liban est le pays élu de Dieu. Non seulement ces gens ont prouvé l’ existence de Dieu, ils savent aussi que c’est le pays élu par Lui. Dites-moi, comment, mais comment, peut-on ne pas aimer cette ville ?
2- La Beyrouth du racisme : « Je me suis pris une bonne Sri lankaise aujourd’hui », « J’ai récupéré la bonne qui s’était échappée aujourd'hui» « Sales Syriens », « Sales Palestiniens », et la dernière mode, mais certainement pas un phénomène nouveau , « Sale Chiites ».Portez vous bien et à la semaine prochaine.
Moussa Bashir