[[Liens en anglais sauf mention contraire] Cela fait trois mois que Meles Zenawi, le Premier ministre éthiopien, a été officiellement déclaré mort à l'âge de 57 ans, [français] après des mois de spéculations quant à son sort. Toutefois, le fantôme de Meles Zenawi ne montre aucune intention de relâcher son emprise sur les Éthiopiens, d'abord à travers ses portraits affichés dans les rues d'Addis-Abeba et de toutes les grandes villes, les villes et les villages ruraux.
Son héritage continue à faire objet de débats dans divers médias internationaux, et les Éthiopiens eux aussi ont pris l'habitude de consulter les médias sociaux tels que Facebook et Twitter pour réfléchir à cet héritage.
Analysant les côtés noirs de l'héritage de Zenawi, Kirubel Teshome se demande pourquoi de nombreux Éthiopiens ne parviennent pas à le replacer dans le contexte actuel.
Kirubel a écrit [lien actuellement indisponible] :
J'avais l'habitude de me poser des questions à propos des gens qui haïssaient profondément Mme Genet Zewde lorsqu'elle était ministre de l'Éducation, mais qui aiment Meles, des gens qui détestent Bereket Simon mais admirent Meles, ceux qui détestent la télévision éthiopienne mais ont un mot gentil pour Meles, ceux qui méprisent les Telecom éthiopiens mais adorent Meles. Maintenant qu'il est mort, on nous dit qu'il a été le penseur et l'homme de toutes les entreprises que le pays a réalisé ces deux dernières décennies, pouvez-vous au moins avoir la décence de les laisser en paix, et de blâmer l'homme qui était derrière toutes ces dégénérescences, de dénoncer l'héritage qu'il a laissé ? Si lui seul mérite tous les louanges, ne devrait-il pas porter également tout le blâme ?
A propos d'un des grands chapitres peu glorieux de l'héritage Zenawi, Abiye Teklemariam a écrit :
Un tribunal éthiopien vient de condamner Bekele Garba, Olbana Lellisa et d'autres pour actes de terrorisme. C'est le pays que nous avons, c'est le pays que nous avons ! Je suis sûr que beaucoup de gens qui chantaient les louanges de feu notre Premier ministre, immédiatement après sa mort, ne savent même pas qui sont ces gens.
Cependant, certains considèrent Meles Zenawi un leader visionnaire et pensent que son héritage doit être préservé. Dans un billet sur Facebook [en], Jossy Romanat raconte une conversation qu'il a eue sur l'héritage de Meles Zenawi avec un ami :
Une conversation, dimanche, entre mon ami (MF) et moi.
MF: Pensez-vous que le PM. Meles Zenawi, était un grand leader?
ME: Oui, en effet ! Il était un grand leader et probablement le meilleur que l’Éthiopie ait vu jusqu'à présent. Toutefois, cela ne veut pas dire qu'il n'était pas irremplaçable, comme vous le croyez toujours.MF: Si vous pensez que le PM Meles était un grand leader, soutenez-vous l'idée de donner son nom à plusieurs institutions ? Comme le “Barrage Renaissance” qui va s'appeler ” Barrage Meles Zenawi” et son portrait imprimé sur le billet de 100 Birrs ?
ME: Il n'y a pas du tout de problème à donner le nom d'un grand chef à des institutions et réalisations. Par exemple, j'ai été heureux de voir que l'Université de Mekelle a rebaptisé son nouveaux campus dans Quiha “Meles Zenawi Institute of Technology” (Institut de technologie). J'ai aussi entendu la même histoire à propos de l'Université Jigjiga.
Et puis, il semble que des universités, des bureaux, des villes et des villages sont occupés à baptiser du nom de Zenawi toutes sortes de choses. On dirait qu'ils font une compétition afin de savoir qui gagne à ce “jeu” chaque jour, ce qui pourrait nous mener au-delà de toute limite. Par exemple, hier, j'ai entendu dire que l'une des plus anciennes écoles secondaires dans le Tigré (qui portait le nom d'un des héros éthiopiens du passé) a été rebaptisée “Lycée Meles Zenawi”. Si cela est vrai, c'est ridicule et constitue un manque de respect envers Meles.
Par ailleurs, n'avons-nous pas d'autres héros locaux qui devraient être reconnus à l'échelle locale, au moins ? Ne pourrions-nous pas baptiser comme nous voulons les choses nouvelles et garder les anciennes telles qu'elles sont. En ce qui concerne le barrage de la Renaissance, je crois qu'il y a lieu de le baptiser Barrage Meles, comme c'était l'un de ses ambitieux projets et qu'il s'était battu avec beaucoup d'énergie et engagé pour sa réalisation.
Toutefois, je crains que cela aille contre la volonté de Meles parce que quand il a décidé de nommer le barrage “Renaissance”, il avait probablement une bonne raison pour cela. Mais je suis toujours complètement d'accord avec l'idée de “Barrage Meles Zenawi”. En revanche, mettre le portrait de Meles sur tout billet de banque éthiopien, je ne pense pas que ce soit une bonne idée.
Le parti au pouvoir en Éthiopie, le FDRPE [fr], qui a eu à subir des critiques constantes pour son utilisation du nom et des photos de Meles Zenawi pour unir le pays selon sa vision. Aujourd'hui, certaines personnes pensent que le parti abuse du défunt leader.
Dans une lettre ouverte [page actuellement indisponible], Kirubel Teshome demande à la veuve de M. Meles Zenawi de faire cesser l'adoration bon marché de son défunt mari:
Lettre ouverte à Mme Azeb Mesfin : Pouvez-vous s'il vous plaît, s'il vous plaît, s'il vous plaît, dire à l'administration municipale de cesser de violer la volonté de feu le PM ? Vous avez dit ouvertement aux Éthiopiens et au monde que Meles n'était pas le genre de personnes à rechercher la gloire personnelle ou pratiquer le culte de la personnalité.
Vous avez révélé comment il aurait détesté voir toutes ces images le représentant les affiches de la ville. Je suis sûr que vous avez sans doute déjà remarqué combien l'administration de la ville a œuvré sans relâche pour aller contre son héritage en recouvrant la ville de photos de feu le PM. Je me demande pourquoi ils ne tiennent pas à le laisser en paix au moins après sa mort ? C'est également aller contre son héritage de faire voir une Addis plus propre et plus verte. Pouvez-vous, s'il vous plaît, demander l'enlèvement immédiat des photos de lui des murs, des clôtures et des bâtiments d'Addis ? Ce serait une faveur que les habitants d'Addis n'oublieront pas !
Depuis sa mort, le défunt Premier ministre a été salué pour la croissance économique [fr] que l'Éthiopie a dit on connue au cours des deux dernières décennies. Parallèlement, il a également été critiqué pour avoir emprisonné des militants politiques et des journalistes, en les accusant d'infractions à des lois vagues sur le terrorisme.