Un moustique femelle, Aedes aegypti se nourrissant de sang humain. Image originelle fournie par RawPixel à partir d'un département du gouvernement américain : le Public Health Image Library, Centers for Disease Control and Prevention. En vertu de la législation américaine, cette image est gratuite.

La situation de la dengue, maladie virale transmise par les moustiques, a pris une tournure périlleuse au Bangladesh. Au 9 août 2023, le nombre de décès causés par la dengue s'élevait à 352 cette année, battant tous les records. Selon les données de la direction générale des services de santé (DGHS) du ministère de la Santé, le nombre de cas de dengue en juillet a dépassé les 43 800, ce qui représente une augmentation significative par rapport aux 5 900 cas recensés en juin. La tendance à la hausse se poursuit jusqu'en août 2023.

Si la dengue était autrefois considérée comme une maladie saisonnière, survenant principalement pendant la mousson (juillet/août), ces dernières années, des cas de dengue ont été recensés tout au long de l'année. Il n'existe pas de chiffres concrets, mais cette étude publiée dans la revue BioMedCentral (BMC) suggère qu'il y a eu jusqu'à 2,4 millions de cas annuels de dengue ces dernières années au Bangladesh.

Le virus de la dengue se propage par les piqûres de plusieurs espèces de moustiques femelles du genre Aedes. Généralement, les patients atteints de dengue présentent des symptômes légers ou restent asymptomatiques, et se rétablissent en deux semaines, car il n'existe pas de traitement spécifique. Cependant, la propagation peut être contrôlée par l'élimination des sites potentiels de reproduction des moustiques (tels que les eaux claires et stagnantes) et par la mise en œuvre de précautions personnelles, y compris l'application de répulsifs contre les moustiques et l'utilisation de moustiquaires.

L'écrivain Dipu Mahmood partage une expérience poignante sur Facebook. Son fils a été infecté par la dengue au début du mois. Il l'a emmené dans un hôpital de la capitale Dhaka et a trouvé tous les lits occupés. Les établissements de santé sont débordés par les patients atteints de dengue ; et il ne s'agit pas d'un incident isolé. Ce type d'expérience trouve un écho sur les plateformes de réseaux sociaux au Bangladesh, où l'on trouve d'innombrables messages soulignant le manque de lits d'hôpitaux disponibles.

Pourquoi la dengue a pris une tournure terrible

La dengue a été détectée pour la première fois au Bangladesh en 1965, sous le nom de fièvre de Dhaka. Au cours des années 2000, le nombre de cas a progressivement augmenté. Cependant, la question qui se pose est la suivante : pourquoi la situation est-elle devenue aussi incontrôlable à l'heure actuelle ?

Epidémie de dengue au Bangladesh – année 2023. Cas hospitalisés par districts, au 11 août 2023. Image fournie par Zeeshan Y Tariq via Wikipedia. CC BY 4.0.

Selon l'évaluation de l’Organisation mondiale de la Santé, une quantité inhabituelle de précipitations, associée à une hausse des températures et à une forte humidité, a contribué à cette épidémie cette année. Les experts affirment que les avertissements ont été donnés au début de l'année. Néanmoins, des doutes subsistent quant à l’efficacité des mesures prises par les autorités pour enrayer la prolifération des moustiques. Des questions ont également été soulevées quant à l’efficacité des insecticides utilisés et à la méthode d'application des insecticides pour lutter contre les moustiques. Toutes ces variables se sont combinées pour créer une situation difficile dans laquelle le pays s'efforce de faire face à l'endémie.

Les Bangladais subissent de plein fouet l’impact du DENV-3, qui est la souche la plus pernicieuse du virus de la dengue cette année. Cette variante provoque une réduction rapide du nombre de plaquettes sanguines des patients, entraînant une maladie grave et nécessitant une hospitalisation. En outre, la virulence ou la capacité d'infection de ce sérotype est beaucoup plus élevée. Les patients peuvent succomber à l'infection en deux ou trois jours seulement.

Dewan Almina (32 ans), médecin à l'Institut de santé maternelle et infantile de Matuail, à Dhaka, a été diagnostiquée avec une encéphalite due à la dengue. Malheureusement, malgré de nombreux efforts, elle n'a pu être sauvée. Son mari, également médecin, a affirmé qu'il avait perdu sa femme parce que l'administration municipale de Dhaka ne s'était pas acquittée correctement de sa mission de lutte contre les moustiques. Dans une interview accordée au Daily Prothom Alo, il a déclaré :

এক মশার কামড়ে আমার পুরো পরিবার তছনছ হয়ে গেল। বাচ্চাগুলো এতিম হলো। ওদের যে বয়স, বড় হতে হতে মায়ের স্মৃতি বলে আর কিছুই থাকবে না। কেউ তো আর ওদের মায়ের অভাব পূরণ করতে পারবে না। আমার জীবনটাও ওলটপালট হয়ে গেল। মশা না থাকলে তো এটা হতো না।’

Une simple piqûre de moustique a détruit ma famille. Les enfants sont devenus orphelins. Quand ils grandiront, ils ne se souviendront plus de leur mère. Personne ne peut prendre la place de leur mère. Ma vie a également été bouleversée. S'il n'y avait pas eu de moustiques, cela ne serait pas arrivé.

Les hôpitaux ont du mal à gérer l'afflux de patients atteints de dengue et ne sont pas en mesure de les admettre correctement. Le Daily Star a tweeté que certains patients ont dû être hébergés à même le sol :

Par ailleurs, 2 742 patients atteints de dengue ont été hospitalisés dans le pays au cours des dernières 24 heures jusqu'à hier matin, ce qui porte le nombre total de cas à 72 225.

Lire la suite : https://t.co/U1LTuTd9N6 #Bangladesh #Dengue #Dhaka pic.twitter.com/fRAKz9fpYX

- The Daily Star (@dailystarnews) 9 août 2023

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— The Daily Star (@dailystarnews) 9 août 2023

Les moustiques changent également de comportement

Dans une étude menée en 2023 par le professeur de zoologie Kabirul Bashar à l'université de Jahangirnagar intitulée Adaptation of Aedes aegypti Mosquito Larvae in Sewerage, Seawater, Brackish Water, and Drain Water: A New Challenge for Dengue Control, il a été révélé un changement dans le comportement des moustiques Aedes porteurs du virus de la dengue. Ces moustiques étaient connus pour piquer principalement aux premières heures de la journée et le soir. Toutefois, des recherches récentes indiquent que le genre Aedes pique également la nuit, bien qu'à une fréquence moindre. Ce moustique avait l'habitude de pondre ses œufs dans l'eau propre, mais il le fait désormais aussi dans l'eau sale.

Des recherches ont montré que la pollution lumineuse dans les environnements urbains contribue à modifier le comportement des moustiques. Autrefois, les gens n'utilisaient pas de lumières vives pendant la nuit. Les lieux de reproduction des moustiques Aedes ont également augmenté en raison de la multiplication des méga-chantiers de construction. En outre, la consommation croissante d'aliments emballés et de boissons en bouteille dans les zones urbaines et rurales génère d'énormes déchets. Les mauvaises pratiques de gestion des déchets ont conduit à l'accumulation d'eau de pluie pendant la mousson, créant des environnements propices à la reproduction du genre Aedes. En conséquence, la population Aedes porteurs de la dengue a augmenté.

Une étude réalisée en 2023 et intitulée Insecticide Resistance Compromises the Control of Aedes aegypti in Bangladesh révèle que les moustiques Aedes à Dhaka développent une résistance aux insecticides. Selon l'étude, jusqu'à 74 % des moustiques volants et au repos ont survécu même après l'application d'insecticides commerciaux.

Le changement de comportement du genre Aedes s'est accompagné d'une modification des symptômes de la dengue. Auparavant, les patients atteints de dengue étaient admis à l'hôpital avec une forte fièvre. Aujourd'hui, la fièvre est plus légère, mais les organes vitaux sont plus gravement touchés, ce qui entraîne un plus grand nombre de décès. La dengue, autrefois considérée comme une maladie urbaine, s'étend désormais aux régions rurales. Cette année, les patients atteints de dengue arrivent à l'hôpital depuis les 64 districts du pays.

Bien que le programme de contrôle des moustiques mis en place par les autorités soit généralement tenu pour responsable de l'épidémie de dengue, les experts estiment qu'un effort concerté des autorités, avec l'implication des communautés et une prise de conscience personnelle, est nécessaire pour s'attaquer à cette endémie.