Ce billet fait partie de notre dossier Gabon.
Les manifestations au Gabon n'ont pas fait de percée dans l'actualité internationale au moment où tous les regards sont tournés vers la crise égyptienne. Mohamed Keita du Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ) se demandait si “les fausses nouvelles ne dessinaient pas une censure réelle” au Gabon [en anglais], alors qu'il analysait la fermeture de la première télévision privée du Gabon, TV+. Pour M Keita, la réaction exagérée du gouvernement d'Ali Bongo est le signe d'une inquiétude plus profonde : ce qui était considéré comme dérisoire jusqu'alors par Ali Bongo et ses partisans paraît avoir créé une véritable tourmente politique dans ce petit pays d'Afrique Centrale.
La stratégie rhétorique du camp Bongo semble se résumer à un déni total de l'opposition.
Sekou Oumar Doumbia, un pro-Bongo, écrit sur la page Facebook d'Ali Bongo :
“Continuez de travailler et laissez les ridicules rêver.”
La situation s'avère néanmoins plus complexe : depuis cinq jours, le pays est en pleine agitation. Mais IQ4News [en anglais], un site nigérian de presse magazine consacré aux questions africaines, a noté que les manifestations au Gabon “sont passées largement inaperçues dans les média du fait de l'attention sur l'Egypte.”
Manifestations de masse à Libreville, le siège de l'UNDP saccagé
Grâce aux activistes locaux, il y a eu une couverture des incidents, qui ont été affichés sur différents réseaux sociaux.
Samedi dernier, une manifestation a été organisée au Carrefour Rio à Libreville, la capitale. Plus de 2000 partisans de Mba Obame sont venus protester contre le gouvernement d'Ali Bongo et ont affronté la force publique.
Cette manifestation fut suivie de violents affrontements entre les partisans de Mba Obame et la police d'Ali Bongo, coincée par des groupes de manifestants dans le bidonville proche du lieu où la manifestation avait débuté.
Le même jour, les forces armées reçurent l'ordre d'attaquer le bâtiment du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) à Libreville, où Mba Obame et son contre-gouvernement s'étaient réfugiés. Camarade, un activiste gabonais, a mis en ligne sur son blog des photos de victimes de l'attaque :
La voix du Peuple Gabonais (LVDPG) rapporte sur son site web que 2000 autres personnes ont manifesté à Bitam, au nord du pays, lundi 31 janvier. Le même site indique que des émeutes ont éclaté dans de nombreux quartiers de Libreville le 2 février. A Atong Abè, un policier a été blessé.
Franklin explique sur Twitter :
“Gabon:Crise politique:Soulèvements populaires en cours; quartiers pauvres de Nkembo, Cocotiers, Gare-routière, Atong Abè. Un blessé grave.”
Vague d'arrestations de sympathisants et responsables
Une douzaine de responsables et de sympathisants de l'Union Nationale (UN), le principal parti d'opposition, ont été arrêtés ces cinq derniers jours. Koaci.com a publié un communiqué de presse du président de l'UN:
“A 5 heures du matin plusieurs compatriotes ont été arrêtés, brutalisés et transférés au camp Aïssa (caserne du Bataillon des parachutistes gabonais), puis au camp de gendarmerie de Gros-Bouquet, avant d’être finalement gardés à vue, à partir du 28 janvier, dans les sous-sols de la Direction générale des Recherches de la Gendarmerie Nationale et ce, au mépris de la loi qui interdit toute garde à vue au-delà de 72h.”
Le ministre putatif des Affaires étrangères, Bruno Ben Moubamba, a tweeté ce matin sur l'enlèvement du fils d'un député gabonais, Alexis Bengone:
“Répression & Brutalité organisées au Gabon. Fils de l'ancien Premier ministre enlevé par des individus cagoulés. #revogab#egypt #tunisia #civ2010“
Certains supposent que son arrestation est liée à son militantisme en ligne. Il dirige le réseau social “Gabao Res Publica“, et aurait tenté de soulever la jeunesse avec cet article: “Gabon : Une génération en quête de sens démocratique”.
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