Et le président du Venezuela découvrit Facebook, 10 ans plus tard

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Le président du Venezuela, Nicolás Maduro, pendant un événement de sa campagne. Photo : Joka Madruga sous licence Creative Commons.

Facebook s'est rapidement propagé parmi les Vénézuéliens à partir de 2007. On estime que 40% des 30 millions d'habitants de ce pays d'Amérique du sud possèdent un compte.

Mais le 9 février, un nouvel utilisateur est venu s'ajouter aux statistiques, et pas n'importe lequel. Il s'agit du président de la république en personne, Nicolás Maduro.

Je vous invite toutes et tous à  me rejoindre sur mon compte Facebook que j'utiliserai dès aujourd'hui de façon quotidienne…

L'arrivée de Maduro sur Facebook, presque dix ans après le début du “phénomène” dans son pays, se produit à un moment très particulier pour le Venezuela. Une crise économique sans précédent frappe le pays avec de multiples répercussions sur la vie de ses habitants, telles qu'une très forte inflation et une pénurie de produits de première nécessité.

Le Venezuela est le pays où l'inflation est la plus élevée au monde et où les pénuries sont comparables à celles d'un pays en guerre.

Pour beaucoup, ce nouvel espace a immédiatement été l'occasion d'exprimer leurs revendications, mais il a aussi été le reflet de la forte polarisation politique. Avec un peu plus de 170 000 abonnés, on peut lire sur “son mur” :

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Capture d'écran du mur Facebook du président du Venezuela, Nicolás Maduro.

“Je ne vais pas jouer les hypocrites, ni faire le lèche-bottes, vous savez que le pays va mal, à cause de votre incompétence et de celle de votre gouvernement. Vous savez que le pays est ruiné parce que tout son capital a été pillé au lieu d'y être réinvesti. Soyez sensé et faites quelque chose de bien pour une fois comme par exemple démissionner et vous flinguer, puisque vous et les vôtres ne servez à rien. Allez vous faire voir [sic], Nicolas Maduro!”, lui dit celui qui s'identifie comme Geo Loyal.

Par ailleurs, Arelis Angarita commente :

Se le saluda mi presidente en verdad no quisiera estar en sus zapatos ,le ha tocado una guerra muy fuerte siempre sere leal , a pesar de las dificultades y saldre a defender el legado de mi amado gigante Chavez”

Bonjour, Mr le président, je ne voudrais vraiment pas être à votre place, vous avez une guerre très dure à mener, je vous serai toujours loyale, malgré les difficultés et je descendrai dans la rue défendre l'héritage de mon cher et grand Chavez”

“M. le président, la sécurité sociale est remplie d’escuálidos (NDT : terme désignant les anti-chavistes), à commencer par Rotondaro, virez-le [sic], beaucoup de conflits institutionnels, les directeurs sont des escuálidos, la chef du personnel est une escuálida, et ainsi de suite DIEU vous bénisse union lutte bataille et victoire nous vaincrons”, lui fait remarquer José Ontiveros.

Ruben D. Sanchez lance sans détour :

Entre aquí por curiosidad pero no puedo mantenerme un minuto mas en esta pagina al ver tantos comentarios de gente tan ignorantes que aun creen que este señor es lo mejor que le ha pasado a nuestro pobre país”.

Je suis arrivé ici par curiosité mais je ne peux pas rester une minute de plus sur cette page quand je vois autant de commentaires de gens ignorants qui croient encore que ce monsieur est ce qui est arrivé de mieux à notre pauvre pays”.

Il est vrai que le chavisme a eu une posture variable par rapport au monde virtuel durant ces 17 années. Au début, on est allé jusqu'à diaboliser la plateforme de microblogging Twitter, l'accusant d'être un “outil d'infiltration impérialiste pour mentir aux Vénézuéliens”.

Mais cette vision a changé en avril 2010 quand le président Hugo Chávez a créé son propre compte @chavezcandanga qui a été un véritable succès et qui a été, pendant plus de deux ans, une importante source d'information pour le monde entier sur les déclarations et les opinions du président.

Toute à l'heure, j'ai discuté avec notre amie Mme la présidente Dilma… Et avec les Camarades Présidents Poutine, Luckashenko, Evo et Rafael Correa!!!

Néanmoins, plusieurs utilisateurs de twitter ont fini en prison pour avoir exprimé leurs opinions et le service a même été bloqué en 2014, pendant les manifestations de février de la même année.

Son héritier et fils politique, Nicolás Maduro, une fois devenu officiellement chef d'État des Vénézuéliens, a continué sur la même lancée en ouvrant le compte @NicolasMaduro. Il aujourd'hui a 2 700 000 abonnés.

Ainsi, l'arrivée de l'ère 2.0 a surtout été perçue comme une opportunité de “contrattaque” idéologique et elle fait partie de la politique de communication de l'État. Le chavisme a cessé d'ignorer et de stigmatiser cet aspect et s'y est intégré.

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