Les internautes africains réagissent aux propos d'Emmanuel Macron sur la limitation des naissances en Afrique

E. Macron en visite au Mali – Capture d'écran via YouTube

Depuis son instauration en 1989 par le Conseil d'administration du Programme des Nations Unies pour le développement, la Journée mondiale de la population est célébrée chaque année le 11 juillet dans le but d'attirer l'attention des habitants de la terre sur l'urgence et l'importance des questions de population. Elle fait suite à l'intérêt de la communauté des nations démontrée à l'occasion de la “Journée des cinq milliards” célébrée le 11 juillet 1987.

C'est par la résolution 45/216 de décembre 1990, que l'Assemblée générale des Nations Unies a décidé de maintenir la Journée mondiale de la population afin de renforcer la sensibilisation, notamment les liens entre les questions de population, l'environnement et le développement. Elle a été célébrée pour la première fois le 11 juillet 1990 dans de nombreux pays. Avec l'appui du Fonds des Nations Unies pour la population et d'autres organisations et institutions, le nombre de pays la commémorant n'a cessé de croitre impliquant plusieurs secteurs de la société civile.

Chaque année un thème est choisi autour duquel célébrer la Journée. Cette année il était – “Planification familiale: Donner aux populations la capacité d’agir, contribuer au développement des pays“.
Le hasard du calendrier a voulu que cette année la date coïncide avec une déclaration du Président français E. Macron sur la démographie galopante de l'Afrique, en réponse à un journaliste africain lors d'une conférence de presse à la fin de la conférence du G20 qui a alimenté un vif débat sur les réseaux sociaux. Le site koaci.com fait le point:

Le Président français Emmanuel Macron a crée la polémique en liant le sous développement de l’Afrique à sa démographie lors d’une conférence de presse au G20 à Hambourg (Allemagne).

Au G20, le nouveau chef de l’ Etat français a crée la polémique en s’en prenant à la fécondité des femmes africaines.

Interrogé sur le développement de l'Afrique, Emmanuel Macron a pointé sur les «7 à 8 enfants» des femmes africaines comme un problème «civilisationnel »

“Le défi de l'Afrique”, “il est civilisationnel”, a déclaré M. Emmanuel Macron, avant de demander : “Quels sont les problèmes de l'Afrique ?” Il cite alors “les Etats faillis, les transitions démocratiques complexes, la transition démographique qui est (…) l'un des défis essentiels de l'Afrique”. “Quand des pays ont encore sept à huit enfants par femme, vous pouvez décider d'y dépenser des milliards d'euros, vous ne stabiliserez rien”, poursuit-il.

Le site visionguinee.info, s'attendant à ce que les chefs d'état africains réagissent à ces propos, s'étonne:

Pas une déclaration, aucune réaction. Les chapelles présidentielles n’ont pas tinté les cloches de l’indignation. Dans un silence coupable, à la limite approbateur, les chefs d’Etat africains, les organisations régionales ou sous-régionales n’ont signé aucun communiqué regrettant ou recadrant les propos condescendants d’Emmanuel Macron sur la démographie galopante qui freinerait le développement de l’Afrique…

Le tollé médiatique des propos d’Emmanuel Macron est à la hauteur des réactions d’indignation et de condamnation sur les réseaux sociaux. Répondant aux questions d’un journaliste ivoirien lors du sommet du G20 en Allemagne, Emmanuel Macron avait fait le lien entre le sous-développement de l’Afrique et l’explosion démographique sur le continent dans des propos qui rappellent le discours de Dakar de Nicolas Sarkozy.

L'utilisateur de Facebook Bouba Camara en réponse à un commentaire de Mohamed Camara, Président de L'Association pour la promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance en soutien aux propos du président françaisécrit que:

Mon cher président du fait que nous avons une croissance démographique est un fait que personne ne peut nier mais la question qu'on doit se poser est:  est-ce-que c'est à un président non-africain de dire à nos femmes combien d'enfants elle doivent faire et comment? Je crois que non car la france-afrique est derrière nous et la colonisation avec je crois donc plutôt que ce soient les gouvernements respectifs des pays africains de lutter contre ce fléau et seulement si il est vraiment un handicap cela faisant en optant pour une bonne politique de natalité et de mortalité enfantine cohérente et adéquate mais aussi en mettant en place un système de planning familial comme font tous les autres gouvernements soucieux du bien être de leurs populations sans omettre que ce qu'il nous reproche est aussi un avantage dans un autre sens parce que les populations africaine sont en majorité jeune donc valide et actif donc retraite assurée pour nos devanciers tandis qu en occident la population est vieillissante peu d'actifs et trop d'inactifs du coup leur retraite est en faillite présentement ceci est un fait.

Charles Ldv Sanches du Sénégal  a écrit :

Je crois que Macron a bien senti passer notre colère. Lui et les autres s'y prendront dorénavant à deux fois avant d'aborder avec légèreté les réalités douloureuses de l'Afrique. Ce qui a été choquant pour moi, c'est le travestissement de la réalité. Au-delà d'une impression d'un prof qui professe, globalement son propos est faux. Du Plan Marshall, à l'aide publique au développement en passant par la question démographique pour terminer sur les diagnostics des problèmes qui gangrènent le continent. Généralisation abusive, simpliciste et déresponsabilisation de son propre pays et continent sur la situation que l'Afrique traverse. Aux Africains qui disent que la meilleure manière de répondre à Macron c'est de l'ignorer. J'ai envie de vous demander pourquoi vous l'ouvrez ? Fermez la et laissez nous répondre. Nous ne répondons par réflexe émotionnel, nous répondons pour rétablir la vérité !

 Noel Gnimassou, vivant à Fria, une ville de l'intérieur de la Guinée, observe:

Voici ce qui m'énerve chez les africains : ils s'arrogent le droit de critiquer les occidentaux, de se moquer d'eux, voire de les insulter : Sarkozy ceci, Trump cela, Macron raciste, etc. On publie des blagues, des photos et des caricatures sur eux. On dissèque et condamne leurs déclarations en se posant parfois la question de leur capacité à gérer les affaires de leurs pays et de ce monde.

Mais nous les africains ne supportons guère la moindre critique à notre égard, fût-elle objective et effective.

Cette observation a généré de nombreuses réactions, pas toujours dans le même sens. Clairefall Fatou  une styliste qui s'est établie à Dakar, a écrit

Avoir 7 ou 8 enfants quand on peut les entretenir, pourquoi pas?  C'est la joie de vivre dans une grande famille ! Il faudrait que nous  soyons fiers de notre culture, elle est très belle et prendre que du bon côté chez autres et ce qui et bien chez les autres n est pas forcément le bien venu chez nous africains.  Arrêtons de nous sous-estimer. On a du potentiel, il faudrait que tous le monde se mette à travaillé pour l avenir de l Afrique et  j'y crois. 

Le débat ne s'est pas limité aux utilisateurs des réseaux sociaux. En effet, même le Président en exercice de l’Union africaine Alpha Condé, à la tête de l'état guinéen, est intervenu dans le débat. Alors que la Guinée est le 3ème pays de provenance des migrants arrivant en Europe à travers la Méditerranée, s'est indigné, déclarant, en dehors de tout bon sens:

Quand vous parlez de démographie galopante, c'est du Malthusianisme, c'est contre l'Afrique. Aujourd'hui, les autres continents nous envient notre démographie, parce que ce sont des peuples vieillissants. Notre jeunesse est notre avantage. Donc, nous devons nous approprier notre propre langage en fonction de ce que nous voulons pour l'Afrique», a fait savoir le président guinéen.

Il y a lieu de se demander si “Son Excellence le Professeur Alpha Condé Président de la Guinée”, comme les médias officiels l'appellent, qui soutient avoir été professeur de droit à La Sorbonne à Paris, parlait au nom de tous ces pairs. En effet la Journée de la population a été célébrée dans presque toute l'Afrique. Par exemple au Niger, la ministre de la Population, Dr Kaffa Rakiatou Christelle Jackou, et au Burkina Faso, Mme Rosine Coulibaly, ministre en charge du développement, le ministre de l’Economie, des finances et du développement, ont souligné l'importance de la maitrise de la croissance démographique ainsi que de la nécessité d'améliorer l'accès aux méthodes de planification familiale pour l'autonomisation de la femme et réduire les défis que la démographie galopante pose aux faibles économies africaines.

Du reste en Guinée même, le ministère du Plan et de la Coopération Internationale (MPCI) a organisé une conférence de presse sur le thème : “Journée Mondiale de la Population” au cours de laquelle le Directeur national de la population et développement (DNPD), Mohamed Sano, a souligné qu’à l’instar de la communauté internationale, la Guinée allait célébrer la Journée Mondiale de la Population (JMP), sous le thème “Planification Familiale (PF) : Autonomisation des peuples, développement des nations”.

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