De l'avis de nombreux blogueurs russes, les Jeux Olympiques d'hiver de Sotchi l'année prochaine ont été déterminants dans l'amnistie qui a libéré, la semaine dernière, à la fois les militants de Greenpeace de l’ “Arctic Sunrise” et les célèbres rockeuses de Pussy Riot, ainsi que dans la grâce accordée à Mikhaïl Khodorkovski, aussitôt envolé de Russie à Berlin. Poutine, dit la théorie, a hâte de sauver la face et d'éviter un boycott olympique des dirigeants mondiaux, même si cinq des sept autres pays du G8 ont déjà fait savoir que leurs chefs ne feraient pas le voyage de Sotchi en février prochain (France, Grande Bretagne, Canada, Etats-Unis, et peut-être même Allemagne).
Ioulia Galyamina de l'Ecole Supérieure d'Economie a écrit sur son mur Facebook :
Путин пытается сделать хорошую мину перед Олимпиадой в Сочи, мотивы его низменны, но несколько свободных человек – это все равно счастье.
Poutine s'efforce de faire bonne figure avant les Olympiades à Sotchi, ses motifs sont bas, mais quelques individus en liberté, c'est toujours un bonheur de pris.
Tout le monde n'est pas de l'avis qu'amnistie et grâce visaient a sauver les Jeux Olympiques. Commentant les dernières rumeurs qu'une troisième série de chefs d'accusation attendait Khodorkovski et que sa mère est âgée et malade, Kiril Rogov a écrit sur Facebook :
Все “третье дело” и болезнь матери – были обыкновенным шантажом, с помощью которого у Ходорковского выбивали согласие на помилование. На кону восе не олимпиада и не возможность широкого жеста под новый год, а – как всегда – деньги.
Toute cette “troisième affaire” et la maladie de sa mère n'étaient que du chantage ordinaire, par lequel [le Kremlin] a extorqué à Khodorkovski l'acceptation de sa grâce. L'enjeu n'était pas les Jeux Olympiques ou l'occasion d'un grand geste de Nouvel An, mais, comme toujours, l'argent.
Oleg Makarenko, le blogueur fritzmorgen, doute lui aussi que Poutine ait libéré Khodorkovski à cause des Jeux.
Версия «Олимпиада» представляется мне смешной. На Олимпиаде лозунги «свободу Ходорковскому» популярностью не пользовались бы в любом случае, там протесты будут, в основном, под девизом «слава Содомии»….
Плакаты о Ходорковском на фоне радужных флагов выглядели бы совершенно нелепо. Очевидно, причина не в Олимпиаде.
La version “J.O.” me paraît ridicule. Aux J.O., les slogans “Liberté pour Khodorkovski” n'auraient pas eu de succès de toute façon. Il y aura des protestations [à Sotchi], mais surtout sous le slogan “Vive la Sodomie”….
Des posters de Khodorkovski sur fond de drapeaux arc-en-ciel aurait eu l'air complètement absurdes. A l'évidence, la cause n'est pas les J.O.
Makarenko de poursuivre avec l'hypothèse qu'une répression anti-corruption débutera au printemps, après les Jeux Olympiques de Sotchi, et que la libération de Khodorkovski est un message aux futurs prisonniers que Poutine est disposé à négocier.
La journaliste de Kommersant Olga Allenova a déploré :
Само по себе это освобождение перекроет все нарушения прав человека в РФ, весь беспредел в Сочи, всю жуть на Кавказе, – олимпиада владимировна пройдет под бурные аплодисменты, все приедут, даже француз, а ВВП может спокойно править еще мильен лет, вообще не парясь ни о правах, ни о свободах.
В итоге он опять выигрывает.
Как всегда.
Это просто невероятно, как они научились это делать.
En soi, cette mise en liberté dépasse toutes les violations de droits de l'homme en Russie, tous les débridements à Sotchi, toutes les horreurs dans le Caucase—les Jeux Olympiques de Vladimir se dérouleront sous une tempête d'applaudissements, ils viendront tous, même le Français, et VVP peut régner tranquillement encore un million d'années, sans s'embêter ni avec les droits ni avec les libertés.
Au total, il gagne de nouveau.
Comme toujours.
C'est juste incroyable, comment ils ont appris à le faire.
Pour sa part, Khodorkovski se dit opposé à un boycott des Jeux Olympiques, justifiant :
Quant à Sotchi, ma position est que c'est une fête du sport ; c'est une fête pour des millions de gens et il ne faut pas la ternir. Il ne faut pas non plus en faire la fête personnelle du Président Poutine — ce ne serait pas juste non plus. Quoi qu'il en soit, je ne voudrais pas gâcher une fête à des millions de gens.
Pendant ce temps, la médaillée d'argent des prisonniers politiques russes, la Pussy Riot Nadejda Tolokonnikova, a exigé un boycott total des Jeux Olympiques, en s'adressant aux journalistes qui ont assisté à sa libération de prison le 23 décembre 2013 :
A présent, cependant, j'appelle à un boycott, en toute honnêteté, j'appelle chacun de nous à ne pas nous vendre pour tout ce pétrole et gaz que la Russie peut donner. J'appelle à l'application des normes, traditions et règlementations, — ces valeurs promues par l'Europe.
Les vértiables raisons de la soudaine remise en liberté de Khodorkovski et de l'amnistie qui a libéré les deux dernières Pussy Riot gardent leur mystère. Si la théorie est exacte que ces actes de clémence résultent d'une volonté du Kremlin de sauver “Sotchi 2014,” on verra au cours des prochaines semaines si des dirigeants occidentaux reviendront sur leur décision et assisteront aux Jeux d'Hiver.